« À Fort-de-France, nous assistâmes pour la première fois à un spectacle, paraît-il fréquent, sorte de survivance du temps de l’esclavagisme dans nos colonies tropicales. Ce que nous vîmes nous écœura. Nous vîmes, en effet, toute une colonne de femmes, jeunes et vieilles, en haillons et pieds nus, portant à dos des couffins pleins de houille d’un poids excessif, qu’elles remplissaient à la pelle dans des gabarres amarrées au quai, pour, ensuite, les vider dans les soutes du Pellerin-La-Touche. Cela se faisait sous le regard de surveillants de couleur, vociférant et hurlant, invectivant les porteuses courbées, écrasées sous les couffins d’où s’échappaient des blocs de houille qui en tombant meurtrissaient leurs pieds nus. Cela avait l’aspect d’un manège humain exécutant sans repos une ronde noire infernale... [...]. Et pour ma part, j’eus honte d’appartenir à un pays qui se glorifie d’avoir aboli l’esclavage et avait statufié le libérateur, dont la statue à Cayenne semblait regarder [...] l’horrible sauvagerie contre laquelle il avait lutté dans le passé. »
« Chaque année, le 1er novembre, jour de Toussaint, on peut assister au cimetière à une veillée qui revêt un caractère de piété macabre : c’est comme une espèce de « réveillon aux morts ». Dès la chute du jour, toutes les tombes s’illuminent. Cet embrasement nocturne des sépultures, parmi lesquelles vont et viennent des silhouettes se parlant à voix basse, comme si elles craignaient de troubler l’éternel repos des ombres, est, en effet, d’un lugubre et saisissant effet. Alors, chacun s’installe, qui sur des pliants, qui sur le bord des tombes, et prie. [...] De pieuses mains illuminent les tombes de ceux qui n’ont plus personne ici-bas. Et l’on voit aussi dans le cimetière des forçats quelques tertres éclairés. Ce n’est pas le côté le moins touchant de cette étrange veillée. »
« Chaque année, le 1er novembre, jour de Toussaint, on peut assister au cimetière à une veillée qui revêt un caractère de piété macabre : c’est comme une espèce de « réveillon aux morts ». Dès la chute du jour, toutes les tombes s’illuminent. Cet embrasement nocturne des sépultures, parmi lesquelles vont et viennent des silhouettes se parlant à voix basse, comme si elles craignaient de troubler l’éternel repos des ombres, est, en effet, d’un lugubre et saisissant effet. Alors, chacun s’installe, qui sur des pliants, qui sur le bord des tombes, et prie. [...] De pieuses mains illuminent les tombes de ceux qui n’ont plus personne ici-bas. Et l’on voit aussi dans le cimetière des forçats quelques tertres éclairés. Ce n’est pas le côté le moins touchant de cette étrange veillée. »