L’homme est une créature visuelle. La première impression viendra toujours de l’aspect extérieur.
On recommence l’année avec entrain, résolu à faire mieux que l’an dernier. On déborde de motivation et d’envie d’apprendre. Tels des chevaux avant une course, on trépigne de s’élancer. On veut se faire nouveau. Neuf. Comme les fournitures.
Lorsqu’on est étudiant, les résolutions, c’est en septembre qu’on les prend. Pas en janvier. On se promettra, par exemple, de ne pas bavarder en classe. On écoutera attentivement ce que disent les professeurs. On tentera de ne pas passer de rattrapage. On évitera au maximum de sécher les cours. On prendra des tas de décisions, déterminé à s’améliorer. On considérera l’année précédente comme un brouillon. Cette fois, on fera mieux.
À force d’entendre parler de formulaires d’inscription, d’épreuves écrites ou de mémoires à imprimer, elle avait oublié que les universitaires ne sont pas seulement des machines à étudier. Dans son temple, ils semblaient n’être dédiés qu’à leurs études. Ils étaient réglés pour n’agir qu’en fonction de leurs partiels, leurs devoirs à rendre ou leurs rapports de stage. Ils étaient pourtant à l’âge où les émotions sont multipliées par mille et où la passion guide leurs pas. Les étudiants avaient un cœur qui palpitait et ressentaient des choses bien plus fortes que leurs homologues adultes, plus fades, moins réceptifs, moins vivants.
L’homme à qui elle voulait tout donner était en fait un roitelet qui ne la comblerait pas, trop petit pour son amour immense. Personne ne paraissait être assez bien pour l’aimer. Aucun homme ne semblait être à sa hauteur. Elle était une tigresse qui s’amourachait de chatons. Elle était née sans moustache, sans flair, et sortait les griffes trop tard. Elle se trompait tout le temps. Elle leur faisait du bien. Elle les faisait grandir et avancer. Elle les rassurait. Elle était le trophée dont ils n’auraient pas osé rêver.
Cet âge ne revient pas.
C’est une courte étape dans la vie dont on ne profite pas assez. Les étudiants sont à l’âge où le cœur peut faire faire n’importe quoi. Où on aime intensément. Où on pense ne plus pouvoir aimer ainsi. On n’aimera d’ailleurs plus jamais ainsi. Une immense flamme de vie les anime. Comment Inès avait-elle pu oublier cela ? À leur âge, la vie ne se résumait pas aux études, comme elle avait fini par le croire. Bien au contraire. Ils étaient à l’âge où l’on exultait. Ils vibraient.
Décembre aussi est un mois important. Il annonce la trêve de Noël. Mois de la tendresse et des retrouvailles en famille, il coupe l’année en deux. Pour les étudiants, il donne le la du second semestre. Chacun mesure quel violon il faudra accorder pour espérer obtenir son année. Décembre, c’est la pause. C’est le mois qui permet de respirer pour mieux se relancer, tête baissée, dans un semestre d’études contraignantes, mais indispensables.
L’imitation était un comportement humain indispensable à l’évolution. Lorsqu’un enfant voit ses parents marcher, il tente d’en faire autant. Lorsqu’il les entend parler, il essaie de prononcer des mots. C’est pourquoi les parents évitent de dire des grossièretés en sa présence. Lorsque, plus tard, il aura lui-même des enfants, il reproduira l’éducation qu’il a reçue. S’imiter les uns les autres, c’est s’éduquer. C’est grandir et s’élever.
Pour certains, les résolutions ne dureraient pas longtemps. L’oreiller étant plus fort que le réveil, ils cesseront de se lever pour le cours de 8 heures du matin. D’autres se feront expulser de classe car ils chahuteront trop, imposant à leurs parents en colère de longues discussions agitées et, parfois, quelques punitions.
La photocopie, c’est tout le contraire d’une limitation. C’est une reproduction à l’infini. Un duplicata silencieux d’un travail initial, imitable à souhait. C’est un double. Un mime. Le mime imite sans parler. Muet, il reprend un exercice déjà terminé pour le reproduire en quelques secondes.
Le temps est le pire ennemi de l’allégresse. Il fait oublier les plaisirs passés. Le temps tue le bonheur.