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Citation de berni_29


LES GRAINES PARLENT

Nous avons faim, mais le sommeil s'abat sur nous.
Nous avons soif, mais la Mère nous a dit
qu'il est trop tôt pour l'éveil.
Nous palpitons, impatientes, contre la fine membrane, repoussons les ténèbres
qui nous retiennent, suspendues dans une presque-mort
qui n'est pas la mort.
Nous étreignons le temps dans cet espace, accrochées au fil
qui s'élance infini vers les étoiles.

La Mère nous a dotées d'une patience plus forte que la faim, plus forte que la soif.
Nous habitons un royaume de rêves et d'esprit.
À l'approche du soleil,
nous nous éveillons et embrassons la chaleur, nourries par la terre et gorgées de pluie.
Au retour du froid, nous nous terrons de nouveau
pour reposer et rêver.

Nous nous rappelons quand le monde entier avait son propre chant.
Connaître le chant c'était parler à tous les êtres
dans leur propre langue.
La terre racontait des histoires de lieux lointains, de montagnes et de falaises et de vallées verdoyantes.
La rivière puissante chantait sa course lente le long des arêtes
qu'un glacier avait creusées autrefois.

Jadis, quand le gel mordait encore les tréfonds de la terre,
vinrent les Humains.
Ils nous éveillèrent de leurs chants, nous offrirent leurs prières.
Ils venaient en humbles cousins,
inquiets pour la vie de leurs enfants.
Un Accord fut conclu.

Nous avons renoncé à notre état sauvage pour vivre alliées aux Humains.
Grâce à nos soins mutuels, le Peuple et
les Graines survécurent.
Durant de nombreuses générations, l'Accord fut respecté.
Notre faim nourrie,
notre soif étanchée, notre impatience assouvie
chaque fois que nous percions
la croûte de la terre et nous élancions vers le soleil,
vers les étoiles.

Puis vint un long silence, sécheresse de la mémoire, temps de ténèbres.
Ils ne venaient plus nous appeler avec chants et prières.
Mais nous attendions, comme
la Mère l'avait intimé. La terre continuait de tourner
saison après saison,
mais les Humains ne sont pas revenus. Notre temps est presque écoulé ;
le rythme de la vie défaille, la pulsation ralentit.
Notre attente touche à sa fin.
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