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Citation de collectifpolar


Florent Bonnevy n’était pas un époux ordinaire, ne le deviendrait jamais. C’était une singularité dont il avait averti Justine dès leur première rencontre, il y avait de cela deux ans et six mois. Si elle ne lui en avait que rarement fait grief depuis lors, elle en éprouvait ce soir-là un furieux picotement.
S’en plaindre ? Et à qui ? Aux boiseries, à la cheminée, au miroir de la coiffeuse, à leur portrait ? Avoir convolé avec un courant d’air ne lui offrait d’autre ressource que de lancer ses mules, et d’une, et de deux, contre une image peu ressemblante. Avait-elle le sourire niais, sur cette peinture, ainsi piquée à son clavecin, en parfaite épouse docile ! Et lui, penché sur elle, à l’étroit dans l’habit de velours émeraude que Largillière l’avait forcé à revêtir ! Il s’ennuyait à poser, c’était manifeste, nullement flatté qu’un portraitiste de si grand renom lui fît l’honneur de le peindre. Même figé sous le vernis, il semblait sur le point de s’envoler, happé hors du tableau par quelque souffreteux à panser, quelque étrangeté à comprendre. Que pouvaient la gorge ronde, la peau tiède et rose, l’aimable babil d’une jeune femme en bonne santé contre la curiosité insatiable d’un pareil homme, si friand des pustules, des malheurs, des discours de ses malades ?
À quoi bon les avoir lancées, ces mules ? Si irritée fût-elle, la petite Mme Bonnevy ne pouvait s’empêcher de le trouver beau, son maudit fuyard, et non seulement par le talent du peintre.
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