Donatien Grau

Après cela, il y a eu tout cet autre matériau : le ketchup. Mon père mettait toujours du ketchup sur sa nourriture. C’était toujours sur la table de la salle à manger familiale. Mais le ketchup devint lié au sujet de la peinture. Je pouvais peindre avec, mais il avait aussi ce lien avec mon père, tout en ressemblant à du sang, et à du faux sang. Hollywood n’utilise pas le ketchup comme faux sang. Ils utilisent un mélange de sucre et de colorant alimentaire. Mais le ketchup arrivait dans une bouteille qui était si pop, comme la boîte de Campbell Soup, et super phallique, aussi. La façon dont on utilise le ketchup m’intéressait : pour le sortir, il faut le retourner, le secouer, c’est une métaphore de la masturbation ; et cela fait un bruit qui rappelle la fornication. Le ketchup, le sang, la nourriture, le pop, le père. Ce n’est pas un objet doté d’une singularité, à mes yeux, c’est un objet aux existences multiples, aux significations multiples. Et ensuite il suffit de prendre les autres produits alimentaires, la moutarde comme merde, la mayonnaise comme sperme, le chocolat comme merde. Et tout cela finit par être des matériaux disponibles à l’usage.