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Citation de lanard


lanard
12 septembre 2011
Une traversée critique des savoirs

C'est à partir de la représentation littéraire que Flaubert va interroger les positivités de son époque, juger et démystifier les différents savoirs, les pratiques institutionnelles ainsi que les stratégies de discours. A travers les expériences menées par les deux "bonshommes", Flaubert passe en revue les sciences et systèmes de pensée du XIXe siècle, de l'agriculture et la chimie à la religion et l'éducation en passant par la médecine, l'archéologie, l'histoire, la politique. Le bilan des connaissances s'accompagne d'une condamnation des croyances saugrenues et des sottises contenues dans les traités scientifiques. Les erreurs commises par les deux novices qui se répètent de chapitre en chapitre, les contradictions entre le savoir théorique des livres et les situations pratiques, la fragilité de l'acquisition et de la transmission du savoir, le ratage de la tentative pédagogique, démythifient l'illusion du Progrès scientifique ou moral propre au siècle positiviste. Dans cette parodie de la quête encyclopédique de la philosophie des lumières, l'échec des personnages, renvoyés d'un savoir à l'autre, "embrouillés" par les systèmes, ne parvenant pas à progresser dans leur quête et la construction d'un sens, ouvre sur une crise épistémologique. En juxtaposant des théories et des opinions contraires sans chercher à faire la part de l'exactitude et de l'erreur, l'archéologie du savoir livresque entreprise par Flaubert constitue une sorte "d'encyclopédie"critique en farce" qui tend à annuler et relativiser les connaissances, à anéantir la prétention de la science à constituer un savoir absolu et global. Incertitudes, contradictions, sottises, dogmatisme témoignent de la faillite de la connaissance scientifique et renvoient à une impossible synthèse du savoir. Quant au vouloir savoir, cette passion épistémologique qui anime les deux personnages, ne répond-il pas surtout à un besoin de croire?
La vision nihiliste et pessimiste sous-tendue par Bouvard et Pécuchet qui remet en question les certitudes et les croyances et souligne l'échec des utopies humanistes, se traduit par un scepticisme radical qui sape l'ordre du réel. L'unité du réel se dissout en effet en une multiplicité de faits qui se dérobe à la signification.

Frank Evrard
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