C'était le 22 mai de l'année 1946. Un dimanche marqué au fer rouge. Au-dessus d'une petite colline, à droite du chemin qui mène à Valbona, se dressait une charmante maison en pierres blanches. A l'intérieur, les Z. rassemblés pleuraient leurs fils âgé de 4 ans à peine. Dans les Balkans, une veillée mortuaire est le moment idéal pour élaborer des théories et des prophéties. Là, l'esprit n'a guère plus de confins que les caprices abracadabrants des mots et de la pensée. Tout et n'importe quoi peuvent s'y inviter. Il n'y a pas de limites. Les portes sont grandes ouvertes à qui veut les franchir. C'est l'occasion à ne pas rater pour régler ses comptes. On prend des postures dramatiques, on jubile secrètement, on rit nerveusement et, quelquefois, on pleure le mort. Mais, attention, il faut garder la face. La tête haute et les épaules droites, digne à chaque instant et en toutes circonstances.
Lire des ouvrages clandestins revenait à faire un trafic, et pas n'importe lequel. On est dans le domaine du marché des idées. Or, nos amis les communistes n'aiment ni les marchés ni les idées.