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Citation de Cielvariable


C’est faite. Je suis dans l’avion. Un Dash-8. J’ai l’air de connaître ça, mais pas pantoute, c’est juste écrit sur le dépliant dans la poche du siège d’en avant. Un Dash-8, ça sonne moins bas de gamme que je pensais. Ça fait moins peur… Un peu… Mettons que c’est moins pire que l’avion de brousse avec les portes qui ferment pas que je m’étais imaginé. Tu m’avais tellement dit que ce serait une petite machine…

J’ai le cœur gros. Je braillerais comme dans une scène de film avec un train qui part, mais je me retiens. C’est plein de goons autour qui partent pour quarante jours, je vais certainement pas pleurer pour même pas le quart de ça. Je regarde par la fenêtre pis je vois l’hélice. Quelqu’un qui passe en dessous quand ça tourne au sol, que je me dis, il se fait scalper c’est pas trop long. Je me change les idées.

Au décollage, t’étais là, l’autre bord de la grille, à côté d’une madame qui arrêtait pas de faire des tata. Elle était sûrement plus habituée que toi à ces départs-là. J’ai fait tata aussi, de mon hublot, en espérant que tu me verrais. Tu m’as envoyé la main rapidement, un coup. Tu faisais plus pitié que la madame. Le p’tit était pas avec toi. Je me suis dit qu’il devait dormir dans le char. Plein de temps entre vous autres tout seuls. Vous allez avoir du fun, je suis pas inquiète. Pensez pas trop à moi, là.

Je pars pas pour La Romaine le cœur léger. Je suis pas grosse dans mes shorts. Je sais pas de quoi ça a l’air, je suis pas trop manuelle, j’ai même pas de permis de conduire. J’espère que les gars vont être cool avec moi.

Je suis en route pour les chantiers mythiques où c’est qu’y’a l’air de faire toujours frette: Mont-Wright, Eastmain, La Romaine… Du pareil au même quand j’étais ti-cul. Pis encore aujourd’hui… Des pays lointains qui nous transforment tranquillement de l’intérieur. Je suis en route vers le mur qu’il a construit et qui nous sépare encore, vers là où il a sauvé notre peau. Parce que l’absence, c’était notre méthadone pour passer au travers. «Faites-vous-en pas, votre père est su’l’bord de repartir», que maman disait au bout de dix jours.
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