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Citation de Ahoi242


Le sociologue Edgar Morin, inventeur en 1976 du terme « crisologie », souligne volontiers que « les crises génèrent des forces créatrices ». Le rapport entre crise et création serait alors plus complexe qu’il ne semblait au premier abord. Au-delà d’une banale affirmation du caractère fécond des crises, dans la pensée systémique de Morin, la crise met en œuvre à la fois désorganisation et réorganisation : « Toute désorganisation accrue porte effectivement en elle le risque de mort, mais aussi la chance d’une nouvelle réorganisation, d’une création, d’un dépassement. Comme l’a dit McLuhan, breakdown is a potential breakthrough. » C’est dire une fois encore que l’effondrement (breakdown) peut engendrer bien des percées créatrices (breakthrough). Ne nous hâtons pas toutefois d’y voir un nouvel avatar de la notion de « destruction créatrice » défendue par l’économiste Joseph Schumpeter. L’analyse d’Edgar Morin, rejoint par bien d’autres penseurs, ouvre plutôt sur un autre type de constat, celui d’une crise actuelle engendrée par la perte de foi dans un progrès supposé apporter le bien-être à l’ensemble de l’humanité conformément à l’idéal de la philosophie européenne des Lumières. Nous avons longtemps cru, souligne-t-il, que la science, la technique, l’économie pouvaient résoudre les grands problèmes du monde. Or, en dépit de bénéfices indéniables, les prétendus« effets secondaires » sont en fait cataclysmiques et les potentielles « victimes collatérales » se comptent par millions. Dans ce modèle, la crise est d’abord le signe d’une désillusion face à la promesse d’un développement progressif illimité. Cela ne marche pas ou cela ne marche plus, le moteur s’est enrayé, survient le scepticisme quant à l’ouverture promise d’un avenir radieux. La ritournelle déprimée : « c’était mieux avant ! » signe l’effondrement de nos espoirs dans le futur. La nostalgie du passé recouvre alors une plainte douloureuse : je n’ai plus d’avenir ; devant moi, il n’y a rien (no future, comme disaient les punks, au siècle dernier). La dépression, suggère Freud, est une maladie du temps.

Crise de la créativité
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