Appartenant à la minorité indo-pakistanaise d'Afrique du Sud, Farid Esack (1957) est le benjamin de sept enfants. Son père abandonne sa famille trois semaines après sa naissance. Sa mère mourra à cinquante-deux ans, usée par une vie trop dure. Sa famille étant très pauvre, il connaît la misère la plus cruelle, celle où il faut parfois aller chercher dans les poubelles des restes de nourriture. "De longues périodes passèrent, raconte-t-il, durant lesquelles nous n'avions pas de chaussures, et je me rappelle courant vers l'école à travers des champs couverts de gelée pour éviter la morsure du gel sous mes pieds. A peine moins douloureuses furent les nombreuses fois où mon frère et moi allions frapper à la porte des voisins pour demander un morceau de pain ou faire les poubelles sur le trottoir pour y chercher des déchets de trognons de pomme ou des choses de ce genre."
C'est durant cette enfance difficile qu'il fait l'expérience de la solidarité des voisins, et notamment des voisins chrétiens. Ainsi explique-t-il son attachement constant, depuis, au respect entre croyants de fois diverses : "Le fait que notre oppression soit rendue supportable par la solidarité, l'humanité et le rire de nos voisins chrétiens qui me rendit suspicieux à propos de toutes les idées religieuses qui prétendaient détenir le monopole du salut, et m'imprégna du sentiment profond de la valeur intrinsèque du "religieusement autre". Comment aurais-je pu regarder Mme Batista et Tante Katie dans les yeux tout en croyant que, malgré la gentillesse qu'elles manifestaient dans toute affaire à notre égard, elles étaient destinées à la malédiction de l'enfer ?"
..le Coran est un livre difficile à pénétrer pour ceux qui lui sont "étrangers", et même pour beaucoup de musulmans qui veulent seulement le lire. Le coran est un livre dans lequel on se lance - avec lequel on peut dire qu'il faut se battre - et qui est psalmodié plutôt que lu.