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Citation de Charybde2


Un voisin de mon âge s’était noyé dans son propre vomi d’ivrogne ; à l’heure de m’offrir le corps de son unique fils, la mère n’hésita pas et le médecin du quartier certifia le décès de Christopher Marlowe ; ils veillèrent le cadavre dans un cercueil fermé et l’enterrèrent au pays du Jamais-jamais-jamais. Je suis né à nouveau quelques mois plus tard ; ils sont venus me chercher à Manchester avec une demi-douzaine de documents (dont la carte d’identité et l’acte de naissance), et c’est ainsi que je suis devenu Shakespeare. Mais vous croyez peut-être que rien de tout cela n’est arrivé, qu’il ne s’agit de rien de plus que d’hallucinations d’un malade mental qui a trop souvent été interné au Watson Hospital. Je me fiche de ce qu’ils pensent, car ils sont en train de lire les mots d’un mort publiés par son exécutrice testamentaire. Je suis certain que ce fut une longue (et sanglante) hallucination dans laquelle il y avait forcément théorie conspiratrice, un délire typique. Des cercueils disparus. Des scientifiques fous qui signent de faux certificats de décès. Des ouvriers du bâtiment qui chuchotent autour d’un cadavre masqué jusqu’à ce que Batman ou bien Churchill arrive. Enfin : ce qui est sûr c’est que tous les jours des gens meurent et renaissent sous un autre nom. C’est une industrie qui, si en temps de guerre elle est entre les mains de Sa Majesté, en temps de paix est l’affaire de particuliers. Nous vivons dans un monde qui nous persécute. Il est naturel que beaucoup y voient l’opportunité d’un magnifique commerce aux ramifications internationales. C’est vrai qu’en général, on l’utilise au profit des mauvais, mais, de temps à autre, un innocent en sort favorisé. Mais je suis en pleine hallucination, je l’ai déjà dit. Tous mes amis affirment que j’ai changé de nom pour enterrer, définitivement, la Grande Limace Noire. D’autres disent que je l’ai fait pour ridiculiser la critique en l’embrouillant avec Marlowe et Shakespeare. Qu’est-ce que j’en sais. Nous les écrivains, et les déments plus encore, nous avons tendance à faire une fable du plus insignifiant des épisodes de notre vie, aussi monotone et ennuyeuse soit-elle.
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