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Critiques de Francesco-Paolo Adorno (1)
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Pascal

J'ai eu à la fois moins plus et moins que ce que j'espérais à la lecture de ce livre.



Beaucoup moins du point de vue de la biographie de Blaise Pascal, que Francesco Paolo Adorno évacue en quelques pages. J'ai trouvé cela assez frustrant ; le livre n'est pas épais – moins de 150 pages – et il aurait pu en ajouter une vingtaine pour approfondir l'histoire tout de même assez riche de ce janséniste si doué en sciences.



Mais tellement plus sur le point de l'analyse de la pensée de ce génie du 17ème siècle. Cette analyse, véritable reconstruction de la vision du monde selon Blaise Pascal à travers ses oeuvres (une méthode éprouvée de la collection Figures du Savoir chez l'éditeur Les Belles Lettres) s'est révélée pour moi particulièrement ardue à avaler, mais du coup d'une grande richesse d'enseignements sur la diversité infinie de la pensée humaine. Comme ces cachets très amers au goût qui protègent du mal au coeur en voiture.



Qu'est-ce qui a été si dur à avaler ? vous demandez-vous. Eh bien Blaise Pascal et moi chevauchons des paradigmes très différents à l'origine de nos visions du monde respectives. Pas de relation d'ordre à ajouter hein. Je ne suis pas plus près d'une Vérité Absolue que lui (tiens, même cette phrase ne lui aurait pas plu, je pense) ; nous sommes les produits d'époques très différentes. Je l'ai ressenti comme tel.

J'ai été formé et cultivé dans l'idée qu'il existe une séparation fondamentale et franchement opaque entre les domaines accessibles par la science et par la foi. M'intéressant surtout à la première, je vis avec l'idée qu'il faut à tout prix supprimer Dieu des équations et modèles de la science si l'on veut appréhender les choses avec précision et efficacité.

Pascal appartient à un temps où cette dichotomie n'est pas encore ne serait-ce qu'envisagée ; il faudra attendre le siècle suivant. Et lui-même ne peut considérer le monde autrement qu'en intégrant la Bible dans l'explication. C'est un de ses postulats, de ses axiomes. Envisager de remettre la véracité des révélations bibliques en cause est inimaginable.



Blaise Pascal est cependant un très grand et habile penseur. Il s'intéresse à la résolution par la raison des mystères de la nature (ses théories sur le vide sont là pour le prouver). C'est un maître en constructions épistémologiques. Ce que nous apprend Francesco Paolo Adorno, c'est comment il parvient à intégrer la raison, ce qui deviendra la science, dans une vision du monde dominée par l'Ancien Testament. Le Péché Originel a éloigné l'homme et la nature de ce que l'on peut appeler perfection, nous laissant un univers disgracieux et soumis au mal, mais un univers qui a ses lois qui peuvent être percées par le raisonnement, par une méthodologie logique. La raison est imparfaite, elle ne peut s'attaquer à l'explication du monde idéal d'avant le Péché, mais elle suffit à fournir des explications suffisamment valides pour nos esprits eux-aussi imparfaits. Encore faut-il savoir l'utiliser, et Pascal propose une méthode, basée plus sur l'induction, sur le raisonnement par récurrence, qui s'avèrera efficace.



Donner une place centrale au péché originel dans l'explication du monde est impossible pour moi, et c'est inévitable pour Pascal. D'où ma difficulté à digérer l'argumentaire et l'obligation de forcer ma nature. Mais grâce à l'auteur, la vision de Pascal se révèle pourvue d'une cohérence que je ne lui connaissais pas.

J'étais jusqu'ici persuadé que l'homme était un génie des sciences qui avait été « perdu » du jour où il s'était convaincu que l'approche scientifique se heurtait à un mur infranchissable qui séparait l'homme de la Vérité, que seule la réflexion théologique et surtout la foi pouvait espérer franchir. C'est par exemple un homme désabusé qui nous est présenté dans la pièce de théâtre L'Entretien de M. Descartes avec M. Pascal le jeune de Jean-Claude Brisville.

Ce livre construit une vision de la pensée de Pascal qui supprime ce désoeuvrement face aux limites de la raison. Les deux facettes, raisons et foi, coexistent d'autant mieux qu'elles ne s'appliquent pas aux mêmes domaines. On ne ressent pas de déprime chez Pascal.



Lecture difficile et enrichissante donc. Mais je vais tout de même re-parcourir un vieux magasine Pour la Science consacré à Pascal pour retrouver un des interactions de l'homme avec son époque et avec la science.

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