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Citation de enkidu_


Les confréries religieuses musulmanes, les tarikat, entretiennent également leurs craintes. Car, partout dans le monde musulman, les confréries ont lutté et continuent de lutter contre la domination coloniale, que ce soit les Naqchbandiyya au Caucase, ou la Senoussiya en Afrique du Nord. Celles-ci font peur parce qu’elles agissent clandestinement et qu’elles constituent des réseaux à ramifications internationales, difficiles à infiltrer pour les États coloniaux. Certaines d’entre elles sont perçues comme le moyen idéal pour organiser un soulèvement généralisé dans le monde colonial. Un ouvrage sur les confréries religieuses fait grand bruit à l’époque ; les auteurs y affirment leur nature politique et dénoncent le rôle de certains cheikhs installés à Istanbul sous la protection du sultan. Après La Mecque, Yıldız apparaît comme un autre foyer de la subversion musulmane.

Le djihad est également une source d’inquiétude. L’appel à la guerre sainte pourrait se révéler une arme redoutable entre les mains d’Abdülhamid. Détenteur de l’autorité spirituelle, le calife pourrait appeler les musulmans à se soulever et à faire la guerre contre les puissances chrétiennes. Qui peut dire comment réagiront alors les musulmans des colonies ? Obéiront-ils aux lois de l’administration coloniale ou aux commandements de l’autorité religieuse ? Aux ordres émanant de Londres et de Paris ou à ceux venant d’Istanbul ? Beaucoup d’hommes politiques européens ne cachent pas leur crainte que la fidélité au calife ne l’emporte sur la loyauté à l’égard des métropoles. Le vice-roi de l’Inde, Robert Lytton, l’exprimait clairement dans un message à Disraeli en 1876 : « Si trente mille Russes passent la frontière et nous attaquent, nous pouvons compter sur les musulmans de l’Inde. Mais si trois Turcs arrivent à Bombay porteurs d’un message du sultan appelant à la guerre sainte contre le gouvernement britannique, tous les musulmans répondront à cet appel ». Ainsi, au moment où l’Europe établit sa domination sur une grande partie du monde musulman, la voilà saisie d’une peur nouvelle.

Cette peur a désormais un nom, le panislamisme – le terme est apparu, semble-t-il, en 1877 et il a été popularisé à partir des années 1880, et elle a un visage, Abdülhamid. (pp. 278-279)
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