Alexandre ne comprit que quelques secondes plus tard, lorsque les cris aiguisés de la fillette lui déchirèrent les oreilles, le forçant à se tourner enfin vers elle. Il remarqua alors que son frère ne s’était pas relevé.
— Romain ? appela-t-il.
Son frère ne bougeait pas. Il ne répondait pas non plus. Il gisait sur le carrelage, son petit corps en maillot de bain inerte, une auréole rouge écarlate grandissant sous sa tête.
— Romain, lève-toi...
Il ne put s’empêcher de s’agenouiller devant lui, les genoux dans la mare vermeil, fascinante. Tendrement, il passa la main sur son visage figé et prononça son prénom une nouvelle fois, la voix tremblante, brisée.
— Descends les deux qui restent à la cave avec les autres ! J’appelle Manuel, aboya Patrice à son partenaire.
Vingt ans plutôt, il n'était qu'un enfant innocent qui découvrait le monde cruel dans lequel il existait. Le monde cruel que personne ne semblait voir.
L'humanité devait avoir un voile sur les yeux qui l'empêchait de mesurer la monstruosité, le sadisme, l'atrocité des hommes. Ou peut-être que les humains se voilaient volontairement la face, tout simplement pour ne pas avoir à affronter leur propre humanité...