Cette interprétation n'est pas de l'histoire. Les historiens le savent et le disent.
Les romanciers, je veux dire ici ceux qui romancent, le savent peut-être, mais ne le disent pas. C'est là toute la différence.
Le collégien Descartes, en quittant les pères jésuites, estima que tout ce qu'ils lui avaient enseigné, des fables aux mathématiques, était incertain : méthodiquement, il se mit à douter de tout. Il est rare que des collégiens se montrent aussi irrévérencieux envers l'enseignement de leurs maîtres. Il y a même des pays, comme l'Angleterre,
Mais, en observant le front soucieux de la jeunesse et l'oeil méfiant de la maturité, je me demande si, à ces causes éternelles d'anxiété morale, nous n'en avons pas ajouté de nouvelles qui seraient le propre d'une société contradictoire, fondée tout à la fois sur le principe de l'égalité politique et sur le fait de l'inégalité économique.
Ce sont ces outranciers, en général, qu'on a le plus mal compris, parce que, devant les scandales de leur révolte et de leur scepticisme mystique, on a oublié ce qu'ils avaient pourtant de commun, en leur cœur vide, avec ceux qui cherchaient la rédemption dans des voies exactement opposées...
Ce n'est donc jamais moi-même, quelle que soit ma liberté d'esprit et mon initiative, que je me détermine dans le choix de mes plaisirs et de mes lectures. Tous, nous sommes plus ou moins le riche bourgeois qui dit une bonne fois à son libraire "Envoyez-moi tout ce qui parait d'important ! "
Ainsi, entre l'authentique, élément historique, et l'imaginé, élément romanesque, la différence est peut-être que l'imaginé est plus vrai, parce que plus humain, que l'authentique.