Gauthier Wendling

Les eaux vertes clapotent sous les coups de pagaie. Devant la proue de la pirogue, le rideau de verdure s'écarte doucement alors que nous avançons à contre courant. Je force sur ma pagaie pour garder le même rythme qu'Iktan. On entend des oiseaux voler entre les branches, loin au-dessus de nous. La végétation dense forme comme un berceau au-dessus du fleuve, percé ici et là de rayons de lumière teintées d'émeraude. Des paillettes dorées dansent sur l'eau à l'aplomb des trouées, et parfois on aperçoit l'éclair d'argent d'un poisson qui disparaît aussitôt.

Cela fait plusieurs jours que nous remontons le cours du fleuve Bélize. Parfois le fleuve croise une rivière ou se divise en plusieurs bras sans que rien n'indique la bonne direction. Iktan relève la tête et écoute pendant une minute entière, silencieux, humant l'air. Puis il pointe du doigt l'un des canaux envahis de végétation et reprend calmement sa pagaie. Il n'a que cinq ou six ans de plus que moi, et avec sa silhouette mince et nerveuse, il ne ressemble pas vraiment à un explorateur. Mais il connait son pays et possède un solide instinct. Pour le moment, il ne nous a encore jamais égarés dans un bras mort du fleuve...