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Citation de Danieljean


Dans la passacaille du concerto pour violon en la mineur de Dimitri Chostakovitch, enregistré en 1956 et interprété par l’orchestre philharmonique de Léningrad sous la direction d’Evgueni Mravinski, David Oistrakh nous offre l’expression musicale la plus sublimée, illustrant comme une suspension du temps qu’on aimerait définitive, mais qu’un retour d’orchestre, pourtant attendu, finit par interrompre, laissant l’auditeur hagard. Aucune audition ne nous restituera avec la même intensité l’impression d’arrachement de la première écoute, car le mouvement final du concerto, qui est un burlesque, jette brutalement l’âme dans un monde de haine convulsive. L’intrusion de la violence et du ricanement ne pourra plus être oubliée : elle est comme une blessure dont la douleur vigilante rend toute nouvelle audition de l’œuvre par avance désabusée.

Que signifie ce brillant final ? Chevauchée joyeuse pour les uns, danse mortifère pour les autres – pour moi, conjuration de l’effroi d’une certaine modernité hargneuse, magistralement rendue par l’agressivité débridée du violon. Les contemporains durent apprécier diversement cette provocation dans le contexte politique de l’époque avant que leurs descendants, c’est-à-dire nous-mêmes, n’en saisissent la portée universelle. J’y entends les affres hilares d’une agonie, j’y perçois l’incroyable haine de soi, peut-être le vrai drame caché du monde contemporain, monde masochiste dont l’odeur nauséabonde de religion, de pétrole et de fric intoxique jusqu’aux derniers confins.

Et pourtant, peut-on être sûr du pire ?
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