AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Woland


[...] ... - Je laisse ma porte ouverte jusqu'à ce que vous soyez chez vous [,Melle Mollard].

- Je vous le défends bien ! Pour refroidir toute la maison ! Puisque je vous dis que je n'ai pas peur.

A sa voix, Kachoudas l'imaginait petite et maigre, un peu cassée, un peu précieuse. Il l'entendit descendre les marches, s'engager sur le trottoir. La porte, restée un moment ouverte, se referma enfin. Il faillit crier. Il voulut crier. Mais il était déjà trop tard. D'ailleurs, il en aurait été physiquement incapable.

Cela ne fit pas plus de bruit que, par exemple, un faisan qui s'envole d'une futaie. C'était probablement le froissement des vêtements. Tout le monde, en ville, savait comment cela se passait et Kachoudas porta malgré lui la main à sa gorge, imagina la corde de violoncelle qui serrait le cou, fit un effort sincère pour s'arracher à son immobilité.

Il était sûr que c'était fini et il lui fallait s'éloigner en toute hâte, courir au poste de police. Il y en avait un rue Saint-Yvon, tout de suite après le marché.

Il crut qu'il avait parlé tout seul alors que ses lèvres remuaient à vide. Il marchait. C'était une victoire. Il ne parvenait pas encore à courir. Peut-être d'ailleurs valait-il mieux ne pas courir, ici, dans les rues vides où l'autre pourrait courir aussi, le rattraper, en finir avec lui comme il venait d'en finir avec la vieille demoiselle ?

Une vitrine. C'était, comme par ironie, celle d'un armurier. Il est vrai que le chapelier ne se servait jamais d'armes. Kachoudas ne se sentait plus aussi seul. Il pouvait reprendre haleine. Il aurait voulu se retourner. Encore vingt mètres, dix mètres, et il apercevrait la lumière rouge du poste de police.

Il avait pataugé dans les flaques d'eau et ses pieds étaient mouillés, ses traits durcis par le froid. Il marchait à nouveau comme une personne normale, dépassait la rue du Minage, sa rue.

Il touchait presque au but. Il n'entendait aucun bruit de pas, mais il savait néanmoins qu'on marchait derrière lui, qu'on le rejoignait, il n'osait toujours pas courir, ni s'arrêter, et une silhouette plus grande et plus large que lui se profilait à sa gauche, un pas s'accordait au sien, une voix étrangement calme prononçait :

- Vous auriez tort, Kachoudas.

Il ne regarda pas du côté de son compagnon. Il ne répondit rien. Il ne fit pas tout de suite demi-tour.

Il était seul, il voyait la lanterne rouge, un agent cycliste qui sortait du poste et qui montait sur sa machine.

Il se retourna. Sans plus se préoccuper de lui, M. Labbé qui avait fait volte-face, se dirigeait, les mains dans les poches, le col de son pardessus relevé, vers la rue du Minage, vers leur rue à tous les deux. ... [...]
Commenter  J’apprécie          40





Ont apprécié cette citation (4)voir plus




{* *}