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Critiques de Georges de La Fouchardière (2)
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La Chienne

Tout le monde ou presque connait le film La chienne de Jean Renoir avec l'acteur Michel Simon et que Georges de la Fouchardière, l'auteur du roman, n'a pas voulu aller voir, d'ailleurs. Pourtant invité, il a refusé de voir son roman sur grand écran...



La lecture de ce roman est extraordinaire.

Je ne dirai que du bien de ma lecture.



Comme Georges de la Fouchardière l'explique au tout début de ce livre, il fait parler les trois personnages à tour de rôle.

Chacun donne ses impressions, chacun raconte sa vie, parle de ses trahisons, de ses soupcons...et l'histoire ainsi se déroule et se termine...

J'ai beaucoup aimé.



A lire absolument, si vous aimez les livres anciens, comme je les aime...

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Le crime du Bouif

Avec son personnage fétiche d'Alfred Bicard, dit "Le Bouif", Georges de la Fouchardière fut un des humoristes les plus célèbres et les plus appréciés de l'entre-deux-guerres. Cet authentique aristocrate, issu d'une très ancienne famille de la Vienne, à laquelle appartient également son arrière-petit-fils, le dessinateur de bande dessinée Matt Konture (de son vrai nom Mathieu de la Fouchardière), avait choisi de se moderniser et de se fondre totalement dans le peuple.

Suivant les traces de son père, Georges de la Fouchardière était entré fort jeune dans la fonction publique, mais il s'y ennuyait terriblement, et à partir de 1910, il commença une carrière de journaliste et d'écrivain. C'était un homme sans grande ambition, il voulait seulement amuser ses lecteurs et eut l'idée en 1913 de créer un personnage truculent, un archétype inédit qui immortaliserait le genre de semi-clochard, un peu voleur, un chouïa escroc, un poil contrebandier, pas vraiment un délinquant mais un bohème dont l'existence précaire et débrouillarde, visant surtout à obtenir de l'argent pour le boire, ne s'embarrassait pas de scrupules avec la loi. Bref, le genre de personnage qui pullulait à une certaine époque, et faisait que les gens bien comme il faut préféraient changer de trottoir plutôt que de le croiser.

Aucun écrivain avant Georges de la Fouchardière n'avait eu l'idée de faire un personnage principal, voire un héros littéraire, de ce genre de marginal. Profondément humaniste et républicain, Georges de la Fouchardière tenait à amuser ses lecteurs avec son personnage, mais en lui donnant un caractère sympathique et une vraie dimension humaine.

le succès fut tellement fulgurant que très vite, Georges de la Fouchardière, qui n'avait rien d'un auteur de best-sellers, fut totalement dépassé par la demande des lecteurs et signa la plupart des ses autres livres en collaboration. Si le premier roman du Bouif parut peu avant la Première Guerre Mondiale, il fut ardemment lu par les soldats des tranchées qui avaient bien besoin de se détendre, et Georges de la Fouchardière écrivit, dans les journaux destinés aux poilus, deux petits romans en feuilleton racontant les aventures du Bouif en conscrit sur les champs de bataille, qui furent plus tard réunis en volume sous les titres « Bicard dit le Bouif, Poilu de 2e Classe » et « le Bouif Tient ». Des volumes qui furent l'objet d'amères critiques car, fervent antimilitariste, Georges de la Fouchardière exprimait via son personnage quelques paroles bien senties sur la sottise absolue de la guerre. Mais comment accuser de démoralisation des troupes des récits humoristiques dont l'amusante lecture était un précieux soutien aux forces armées françaises ?

Georges de la Fouchardière se tint coi quelques années, avant de revenir triomphalement en 1922 avec « La Résurrection du Bouif », quatrième volume de la série, dont le succès fit redécouvrir les premiers tomes. On imagine difficilement aujourd'hui le succès phénoménal que connût Georges de la Fouchardière dans les années 20 et 30, et pourtant : presque tous ses romans mettant en scène le Bouif furent adaptés en films muets, en pièce de théâtre, et même en opérettes, pour trois d'entre eux. le succès se prolongea durant quatre autres volumes, jusqu'en 1929 où, après avoir écrit un ultime « La Fille du Bouif », Georges de la Fouchardière rangea définitivement son personnage au grenier. Sans doute ce dernier volume, très dur à trouver car abondamment pilonné, se vendit beaucoup moins que les précédents, mais il est probable aussi que le krach boursier de 1929, qui ruina tant de petits épargnants à travers le monde, eut un impact sur la société française, qui posa un regard désormais plus compatissant sur la pauvreté.

Il n'empêche, Georges de la Fouchardière et son Bouif marquèrent tout une génération, et restent une référence grinçante du pendant populaire des Années Folles. Invité en 1975 à « Apostrophes », François Mitterrand, qui n'était pas encore président, mais déjà écrivain et bibliophile, parla longuement et avec nostalgie de Georges de la Fouchardière et de son Bouif.

Mais qu'était-ce donc qu'un "bouif", qui passa un temps dans le langage courant ? Avant que Georges de la Fouchardière ne s'en empare, le mot "bouif" appartenait à l'argot spécifique au milieu des artisans cordonniers. L'origine linguistique en est mal connue, mais le mot désignait alors un mauvais cordonnier, souvent mauvais parce que fainéant et maladroit. le personnage d'Alfred Bicard n'est nullement cordonnier, mais comme tous les ivrognes, c'est un homme qui se révèle assez avare dès qu'il s'agit d'investir son argent dans autre chose qu'une bouteille. Aussi, sa mise est très défraîchie, ses vêtements sont des haillons malpropres, et ses chaussures, usées jusqu'à la corde et trouées en plusieurs endroits, sont régulièrement consolidées par Alfred, qui ne manque jamais de se vanter d'empêcher la dislocation de ses chaussures avec quelques clous et un bout de ficelle. de là lui vient son surnom de "Bouif".

« le Crime du Bouif » est donc le premier roman de la série, et si le personnage d'Alfred Bicard y est encore un peu secondaire et inabouti, la surprenante modernité de son style étonne encore : « le Crime du Bouif » est en effet un véritable roman policier, obéissant tout à fait aux règles du genre, et dont le ton général tranche de manière frappante avec le style humoristique encore en vogue dans les années 1910. Bien qu'en préface, Georges de la Fouchardière indique s'être inspiré des oeuvres De Ponson du Terrail et de Xavier de Montépin, qui pouvaient en effet inclure des éléments de littérature policière, on ne trouvera rien de ces grands maîtres dans ce court roman d'à peine 280 pages, qui se tient bien loin des rythmes frénétiques et de la logorrhée narrative de ces glorieux feuilletonistes.

« le Crime du Bouif » nous présente d'entrée de jeu Alfred Bicard, que tout le monde surnomme "Le Bouif", remonter lentement l'une des rues de Maisons-Laffite, petite bourgade de l'ouest parisien célèbre pour son hippodrome et ses courses de chevaux, lesquelles sont pour Alfred Bicard l'un des moyens de subsistance. Car à ce moment de sa vie, Alfred Bicard écume les champs de courses comme "pisteur", un terme désuet qui a été remplacé depuis – on ne sait pourquoi, d'ailleurs – par le mot anglais "bookmaker". N'étant pas très fortuné, Bicard ne parie pas lui-même mais étudie quotidiennement les chevaux, et propose des tuyaux à des parieurs naïfs, en échange de la moitié des gains en cas de bonne prévision. Bien qu'il se vante d'être 'le Roi des Pisteurs", Bicard gagne rarement, et fait perdre beaucoup d'argent aux parieurs, ses pronostics étant plus ou moins hasardeux ou fortement influencés par son degré d'éthylisme du moment.

Longeant donc un dimanche le terrain d'un propriétaire équestre à Maisons-Laffitte, Bicard croise l'un des lads anglais qui travaillent pour ce propriétaire et échange quelques mots avec lui, lorsque soudain, en levant les yeux vers les arbres feuillis, il aperçoit ce qu'il pense être le corps d'un animal mort, perché tout en haut d'un arbre. En regardant mieux, les deux hommes se rendent compte qu'il ne s'agit pas d'un animal, mais d'un corps humain mutilé, décapité et écorché. Bicard court immédiatement prévenir la police.

Celle-ci arrive en urgence, fait descendre le cadavre et en confie l'autopsie au médecin de la ville, le docteur Boudon, personnalité austère et sinistre qui fait aussi office de médecin-légiste. Celui-ci néanmoins ne parvient ni à établir les causes de la mort, ni même à identifier le corps, dont la tête est manquante. Tout au plus peut-il situer le décès au jour précédent, samedi.

le comte Lardillon de Lestrivière, propriétaire du terrain équestre au bord duquel le corps fut trouvé, est en séjour en Angleterre. Il faudra donc envoyer à Londres un inspecteur pour l'informer du drame qui s'est déroulé chez lui. Faute de pouvoir identifier la victime, la police commence à chercher un homme porté disparu depuis la veille, et très vite, un indice se présente : Simons, un autre lad du comte, n'a plus été vu depuis vendredi soir, et sa disparition a été signalée par sa femme éplorée qui, lorsqu'on lui présente le corps (ou ce qu'il en reste) affirme reconnaître son mari.

Or, de notoriété publique, Simons a échangé de violentes disputes avec Alfred Bicard les jours précédents, certaines s'étant terminées en bagarre, suite à de bien mauvais tuyaux fournis par le pisteur. Alfred Bicard apparaît d'autant plus comme le principal suspect que son aspect extérieur témoigne d'une existence malhonnête. Il est aussitôt interpellé et incarcéré le lundi même. Mais Bicard est un personnage qui fait grand bruit : il passe ses journées de détention à injurier ses geôliers, les interrogatoires qu'on lui fait subir sont une épreuve qui vient rapidement à bout des nerfs des agents de police, qui en ont pourtant vu bien d'autres. Pour parler, Alfred parle, mais il n'est pas une de ses paroles qui ne soit une injure ou une moquerie pour les agents autour de lui ou pour l'autorité qu'ils représentent. Les policiers finissent par renoncer à démêler les intentions de ce fou, et annoncent à la presse avoir identifié et arrêté l'assassin de Simons, un petit voyou du nom d'Alfred Bicard, dit le Bouif.

Mais à peine, les journaux sortent-ils de presse qu'une brigade de police parisienne amène à ses collègues de Maisons-Laffitte un citoyen arrêté dimanche soir dans un quartier festif de la capital, où, ivre mort, déguisé en Louis XIV, aux bras de deux prostituées, il s'amusait à agresser et à jeter des tomates sur des gens à la terrasse d'un bar, dont, hélas pour lui, un juge d'instruction.

Arrêté dans ce comique déguisement, n'ayant aucun papier sur lui, il fallut attendre qu'il soit complètement dégrisé puis décidé à parler pour qu'on puisse enfin l'identifier : il s'agit de Simons, le lad disparu depuis vendredi. En fait, profitant de l'absence du comte, il s'était enfui à Paris avec une grosse somme d'argent qu'un homme mystérieux lui avait offerte, et n'avait pas dessoulé du week-end.

Dès le lendemain, la police est bien évidemment tournée en ridicule par la même presse qui, la veille, avait relayé son exploit. Simons n'étant pas mort, Alfred Bicard ne peut être son assassin, et on le relâche aussitôt. L'inspecteur envoyé en Angleterre apprend par télégramme à ses collègues que le comte Lardillon de Lestrivière n'est jamais venu dans la maison où il était attendu, et que nul ne l'a aperçu ce week-end. C'est donc bien son corps à lui que l'on a retrouvé en haut d'un arbre attenant à sa propriété…

Cette incroyable affaire commence à intriguer le "Grand-Quotidien" , un torchon connu pour faire profit de tous les scandales. le journal envoie son meilleur limier, Lafrite, mais dans cette petite ville bourgeoise honteuse du crime commis sur son terrain, les portes se ferment, et même la police locale, ayant encore sur le coeur les moqueries publiées, envoie bouler le journaliste sans ménagement. Lafrite comprend vite qu'il ne peut compter dans cette ville que sur un seul homme, heureusement à la langue sacrément bien pendue : Alfred Bicard, dit le Bouif.

Tous deux vont mener une brillante enquête, jalonnée de nouveaux cadavres et de bijoux volés, qui va les mener sur les traces d'un étrange prêteur sur gage, qui a avancé des sommes colossales au comte Lardillon de Lestrivière, mais aussi au Docteur Boudon, le médecin-légiste, lequel cachait soigneusement sous son apparence austère une addiction ruineuse aux paris sur les courses de chevaux…

« le Crime du Bouif » est donc un assez bon roman policier, dont les éléments humoristiques restent parallèles à l'intrigue, et n'entravent pas l'enquête réelle pour découvrir l'assassin du comte. Cet étrange concubinage de polar moderne et de truculence gauloise – et il faut peut-être voir dans cette truculence le véritable héritage du roman-feuilleton, lorsque celui-ci dépeint sans filtres des milieux interlopes - confère à ce roman une originalité inédite mais néanmoins réaliste qui n'est pas sans préfigurer, évidemment de manière plus académique, ce que seront les futurs polars humoristiques de Marcel E. Grancher et de San-Antonio.

Il n'empêche que Georges de la Fouchardière ne possède pas encore la maîtrise narrative et l'imagination délirante de ses continuateurs, et que son roman souffre d'une certaine platitude, voire d'un certain déséquilibre. Car bien que le Bouif soit un personnage drôle et attachant, il ne sert plus à grand-chose une fois sorti de prison, et Georges de la Fouchardière pallie cette relative inutilité par de nombreux et amusants monologues gouailleurs, mais qui n'apportent rien de très concret à l'intrigue. Ce ne sera que dans les tomes suivants que le personnage prendra un peu plus d'épaisseur.

Néanmoins, « le Crime du Bouif » se laisse lire, et même relire, comme un agréable polar franchouillard d'un autre siècle, sans d'autre ambition que d'amuser et de distraire.
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