En juin 1940, Otto Abetz est là pour mettre en place une collaboration entre l'Allemagne et la France. Parmi les premières démarches se trouve la remise sur pied de la vie intellectuelle. De nouveaux journaux sont fondés, des maisons d’édition reprennent leur travail, certaines passant directement aux mains des services de l’ambassade d'Allemagne, d’autres restant simplement sous leur contrôle. Pour gagner la sympathie des écrivains et leur soutien à la politique de collaboration, ceux-ci deviennent l’objet d’une attention toute particulière. Associés aux nombreuses manifestations
organisées par l’ambassade et ses services , sollicités pour diverses interventions et participations, y compris une campagne de traduction d’ouvrages allemands lancée dès 1940, Otto Abetz s’efforce ostensiblement de flatter les intellectuels prêts à collaborer et à assurer une ambiance stimulante pour la création. De nombreux écrivains et éditeurs sont alors disposés à s’engager en faveur de l’idée d’une collaboration avec l’occupant.
Ils devront en rendre compte à la libération et se retrouveront sur des listes noires établies par le Comité National des Ecrivains. Les variations d'une liste à l'autre se fait dans la précipitation et un manque total de discernement. Les suppressions et les rajouts témoignent aussi de certains "arrangements".
Outre les appuis, celui qui n'est pas resté à Paris pour se rendre à la police, qui a su mettre entre la justice et lui un nombre de mois nécessaire à l'apaisement des haines et des vengeances, celui là évitera les sanctions les plus lourdes.
Les naïfs et les imprudents payent autant que le traitre.
Leurs œuvres passeront d'un purgatoire de plusieurs années à un oubli quasi total. Certaines maisons d'éditions disparaitrons définitivement.
Faut t'il faire la dissociation entre l'écrivain et le polémiste et se contenter de penser qu'en art, un salaud, cela ne veut rien dire ?
A chacun sa réponse, mais il semble qu'aujourd'hui un mouvement éditorial s'amorce puisque l'on peut facilement trouver en librairie les «Deux Etendards» de Rebatet (Gallimard 2007), Jouhandeau, Pierre Drieu la Rochelle (La pléiade 2012), «Journal inutile» de Paul Morand (2001) . Déjà le Livre de Poche avait donné l'exemple puisque l'on pouvait, sous cette forme, lire Brassillach en 1963 (N°1492, 3702), Jean De La Varende en 1966 ( N°41), G.Blond, de Châteaubriant .Cependant la Correspondance entretenue par Morand et Jacques Chardonne de 1949 à 1968 se fait attendre.
Trop de procès en perspective ?
Avant d'être fusillé par les Allemand Jacques Decour signa une «Lettre ouverte aux anciens écrivains français» :
«Vous avez choisi l'abdication, la trahison, le suicide. Nous, écrivains français libres, avons choisi la dignité, la fidélité, la lutte pour l'existence et la gloire de nos lettres françaises.»
Les réprouvés de 1944 le restèrent longtemps. Il fallut les lois d'amnistie signées par le président Vincent Auriol le 5 janvier 1951 et surtout le 6 août 1953, pour mettre fin à ces mises à l'index.