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Citation de Cielvariable


NOUS AVONS TOUS CONSTATÉ, à diverses reprises, que les maisons vieillissent comme les visages. Elles s'imprègnent des moments d'émotion au point d'en conserver la trace, plus ou moins floue, plus ou moins visible, même après un changement de propriétaire.
Il existe ainsi des maisons joviales, qui restituent encore l'accueil souriant d'un ancien occupant optimiste et bienveillant. D'autres replient leurs fenêtres sur des drames qu'il vaudrait mieux faire semblant d'ignorer. Et je mentionne à peine les maisons conformistes, encombrées de meubles de famille et décorées seulement de bibelots offerts à l'occasion de mariages ou de baptêmes, car dans ces maisons-là, rien de spontané ni de sincère n'a vraiment été vécu.
Évidemment, les maisons d'écrivains sont dif­férentes. L'hôtel particulier qu'occupait Victor Hugo à Paris, sur la place des Vosges, semble encore traversé par le puissant paraphe du poète : sa signature reste omniprésente sur ses manuscrits originaux, comme sur ses dessins et sur certaines de ses photographies. La demeure de Balzac, embusquée au creux du seizième arrondissement de Paris, pourrait paraître confortable, douillettement repliée derrière le lierre de son jardin, si l'on ne remarquait pas qu'elle comporte deux issues, ce qui permettait à l'écrivain de fuir ses créanciers. Quant au pavillon de Medan, que Zola surnommait sa «cabane à lapins», il s'enorgueillit encore des deux tours que l'auteur a fait édifier de part et d'autre, après le succès financier de deux de ses livres, Nana et Germinal. Et surtout, la fenêtre du bureau du romancier permet d'apercevoir l'endroit où vivait celle qui avait été sa lingère avant de devenir sa maîtresse et de lui donner deux enfants. Il arrivait que, dans la solitude de son bureau, Zola délaisse momentanément ses personnages pour s'évader de sa page blanche jusqu'à son balcon et observer avec des jumelles sa seconde famille...
Chaque écrivain a son secret. Mais sa maison le trahit.
On aurait donc tendance à imaginer que la demeure d'un auteur de romans d'énigme, comme Maurice Leblanc (1864-1941), est empreinte d'une atmosphère mystérieuse, avec d'étroites fenêtres, ouvertes moins sur la lumière du jour que sur les ombres du salon.
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