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Critiques de Gilbert Vieillerobe (3)
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Rats de marée

Des gens investissent les rayons boulangerie des supermarchés ainsi que les boulangeries des villes, ils s’en vont avec leur baguette ou leur pain, impassibles, sans vouloir payer. Voilà un début très kafkaïen qui se poursuit avec des locataires qui ne payent aux agences immobilières que la moitié de leur loyer et déclarent que « la moitié est le prix juste ». C’est ensuite des voyageurs qui refusent de payer leur billet de train parce qu’ « aujourd’hui, c’est gratuit », puis ce sont un peu plus tard les résidences secondaires qui sont occupées de façon illicite par des déclassés. Un autre jour ce sont les gens portant uniforme qui sont la risée de tous les passants qu’ils croisent. Mais il faut que tout cela cesse, c’est le boulot confié aux cyber-gendarmes, et on passe dans l’univers du policier. Même le pantin de l’Elysée, un grand guignol aviné, roulant des épaules et s’en prenant à tous ses les sous fifres concernés par l’affaire, s’en mêle. Une enquête rondement menée va conduire les cyber-policiers vers une technopole de Savoie menant des recherches sur les nanotechnologies. «Rats de marée » est le nom donné à l’opération que va lancer un petit groupe d’activistes bénéficiant des résultats des recherches des ingénieurs de cette technopole.

Un petit livre bien tourné, agréable à lire, à l’humour grinçant et percutant qui s’en prend aux détenteurs du pouvoir, aux autorités, à l’ordre existant c'est-à-dire la normalité : la société policée, encadrée, consumériste, celle du toujours plus, la société de la croissance, et à l’usage qui pourrait être fait des technologies de pointe.

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Serge

Serge est assis sur son banc, parfois il fait le tour de l’établissement en passant au plus près du grillage puis se rassoit sur son banc et regarde encore la plaine devant lui. Non Serge n’est pas idiot, bien au contraire, Serge observe, cogite, se remémore. Il se remémore comment était la plaine autrefois et ce qu’elle a subit du fait de son exploitation. Serge se remémore sa vie depuis sa petite enfance, cette mère, cette fille mère qui ne l’aimait pas et lui faisait subir des sévices qui un jour ont failli lui ôter la vie. Sa mère traduite en justice et condamnée pour maltraitance, Serge fut alors placé dans une famille d’accueil, chez des paysans, Hélène et Georges qui vont prendre soin de lui et lui donner l’amour que sa mère lui refusait. A l’école, puis au collège et au lycée il fut un élève brillant. Mais après sa sortie de prison sa mère en réclama la garde et repris la maltraitance sur son fils qui excédé, un matin, se saisit d’un couteau et lui asséna de nombreux coups sous lesquels elle succomba. Il était alors au collège, âgé de douze ans. Placé dans un centre spécialisé il put poursuivre ses études. Les filles du collège étant attirées par sa personnalité, l’une d’elle en tomba amoureuse, cependant le fait qu’il vienne d’un établissement éducatif met la ville en émoi et Serge doit encore faire face à l’hostilité et être déplacé, encore…

Ce livre m’a beaucoup touché et ému. Le style est superbe et particulièrement adapté au récit de Gilbert Vieillerobe, la construction est elle aussi parfaite. Il évoque avec brio et acidité le monde où nous vivons. Je pense que « Serge » vaudrait amplement l’attribution d’un grand prix littéraire, mais connaissant un peu le personnage je doute qu’il soit intéressé par une telle notoriété et tout le tralala qu’elle implique. Il préfère sa liberté sacrée, son plaisir de l’écriture et des marches qu’il effectue en solitaire sur des milliers de kilomètre en Russie, en Italie ou ailleurs. J’aurais tout de même des explications à lui demander concernant deux phrases que j’ai notées et qui m’ont interpelées. Merci Gilbert pour ce chef d’œuvre, et le plaisir que j’ai éprouvé à sa lecture.

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Rats de marée

D’un côté il y a les scientifiques. L’auteur – qui réside dans les Alpes du nord – situe une partie de l’action dans l’une de ces villes qui s’est faite une spécialité de ce que l’on appelle les « technologies du futur » regroupées dans des Technoparcs : informatique, nanotechnologies et autres sciences en blouse blanche et chambres stériles. Les scientifiques sont-ils des apprentis sorciers ? L’auteur les présente comme des personnes passionnées par leurs recherches et ne voyant que le bon côté des applications futures – quand ils en voient… Dans ce laboratoire, des aoûtas miniaturisés pourraient aller inoculer un vaccin dans une cellule cancéreuse ou renouer des cordes vocales, – « enfin, vous voyez, que des trucs sympas ». Dans cet autre labo on est sur le point d’aboutir à un « nanofil », un fil d’un milliardième de millimètre sur lequel on enfilerait des atomes comme on enfile des perles… « Génial, non ? A vrai dire on ne sait pas encore quoi en faire… Des couronnes mortuaires pour cellules cancéreuses ? des dreadlocks pour têtes de génomes ? » Mais les bienfaits potentiels de la science peuvent évidemment être détournés et utilisés à d’autres fins. Dans son roman Gilbert Vieillerobe imagine ce qui pourrait se passer si des « terroristes » (les « Bricoleurs »…) tentaient de « détourner la science et la technique » pour la « mettre au service de l’humanité » ? Avec des applications… inattendues et qui vont provoquer une sacrée pagaille. Une pagaille que le Pouvoir ne peut évidemment pas admettre.



Face aux scientifiques et aux « terroristes », le pouvoir temporel, très temporel, est décrit avec pas mal de railleries. Mais l’auteur n’est peut-être pas si loin de la réalité. Car on voit bien que plus les « Bricoleurs » agissent – parfois avec quelques ratés… – plus les problèmes deviennent incompréhensibles, et moins les fins limiers de la Républiques (qui se détestent, qui n’échangent évidemment pas leurs informations) ont de réponse, et plus les chefs et les ministres valsent. Impuissants. Uniquement préoccupés par le présent et leurs prébendes. Le Président est déprimé, « à demi drapé dans une robe de chambre bleue, allongé sur une bergère, il tient sa tête levée en s’appuyant sur un coude », il boit de la vodka à la santé de son « copain le Premier Ministre de Russie ». Son homme de confiance est surnommé Mazarin. Bref, Vieillerobe démontre que dans certains cas il est possible de ne rien savoir, de n’avoir aucun élément et pourtant de prendre des décisions… La comédie du pouvoir.



Comme dans tout bon roman, qu’il soit d’anticipation ou pas, il y aura un grain de sable… Il y a toujours un grain de sable (et même : deux !). Mais il ne faut pas en dire trop. Sinon que si vous rentrez dans cette histoire, il est possible que vous ne puissiez pas lâcher facilement ce livre. Le sujet est passionnant, bien présenté, bien amené, le suspens est bien ficelé. L’écriture de Gilbert Vieillerobe est simple, efficace. Et l’auteur ne manque pas d’humour. Vraiment un bon livre de divertissement – entre conte philosophique et roman d’anticipation – mais aussi de réflexion sur nos sociétés « technicistes, hiérarchisées et mondialisées ». Le meilleur des mondes n’est pas encore sûr…



Les premières lignes : « Les carrosseries offrent leurs fronts, luisants et blêmes, aux caméras de surveillance. Impossible de trouver une seule place libre sur l’immense parking de l’hypermarché. Phénomène inhabituel, le nombre de véhicules stationnant sur les bas-côtés, les voies d’accès réservées, les contre-allées, les parterres même, laisse chacun incrédule. Une affluence remarquable ! Devant les écrans, dans la salle confinée, Gustave, le chef de la sécurité, mi-allongé dans son fauteuil, un pied posé sur une chaise voisine, engouffre son quatrième pain aux raisins. »



Gilbert Vieillerobe – Rats de marée

L’Harmattan 2012

Parution le 27/07/2012

17€ - 172p
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