Gilles Caillot

Je tente d’éviter le miroir mais, comme s’il prenait un malin plaisir à me torturer, il me renvoie l’image que je fuis désespérément. Celle d’une femme usée par la vie, d’une femme au bout du rouleau. Une image bien différente de celle que j’avais quelques années en arrière. C’est vrai : il n’y a pas si longtemps, j’étais assez satisfaite de ce que Dieu m’avait alloué. Plutôt jolie, et le succès qui va avec. Taille acceptable, dans la bonne moyenne. Une longue chevelure brune légèrement ondulée. Une peau naturellement hâlée qui me donnait, même en hiver, un délicieux teint chocolat au lait. De grands yeux bleus en amande qui en ont fait craquer plus d’un.
Bref, tout ça, c’était avant… Cette belle jeune femme a disparu. Aujourd’hui, mes traits se sont creusés et les cernes et les rides ont envahi mon visage. Trop marquée par le temps. Trop marquée par la vie, par le tourment de ma dernière décennie.