Gilles Leclair

Dans cette affaire qui avait pour objet d'élucider les causes de la mort de M. Robert Boulin, aucune des hypothèses criminelles formulées au fil des années n'a été confirmée. J'avoue pour ma part avoir été parfois époustouflé devant les prétendues certitudes ou affirmations, assénées peut-être avec sincérité par certains personnages ayant tenté de faire entrer Robert Boulin dans un scénario criminel. J'ai été aussi déçu devant l'absence de professionnalisme dont ont fait preuve ceux qui, dans la presse écrite ou lors de reportages télévisés, s'en sont contentés, sans pousser plus avant leurs vérifications

J’ai tenu à rendre public ce témoignage pour apporter mon éclairage et défendre l’honnêteté et la probité des enquêteurs qui ont travaillé sur ce dossier. Il fallait que des voix s’élèvent pour dénoncer la manipulation de l’opinion qui consiste, depuis 1983 à dénigrer les actes d’enquête et à accuser in fine l’ensemble des policiers et des magistrats de l’époque d’avoir été aux ordres et d’avoir travesti la vérité.

Son acte courageux du 29 octobre 1979 est d'ailleurs à souligner, a posteriori, au regard de l'actualité que nous vivons depuis plusieurs années et des nombreuses affaires qui mettent régulièrement en cause certains personnages politiques - toutes tendances confondues -, parfois haut placés, dans des scandales financiers. On a même créé un Parquet national financier pour suivre ces affaires. Si ces personnages malhonnêtes et/ou amoraux avaient la même dignité que Robert Boulin en son temps, on compterait de nombreux suicides. Mais la banalité étant devenue la règle dans ce type de dossier, on assiste plutôt à d'autres formes de défense, bien moins glorieuses. Chaque personnalité mise en cause se drape dans sa dignité, affronte le Parquet national financier en minimisant les charges qui pèsent contre, et le plus souvent nie jusqu'à l'évidence. L'honneur, la dignité, le respect de la fonction ont été remplacés par le mépris, la condescendance et la croyance en l'impunité.

Pourquoi cette croyance populaire est-elle aussi vivace ? Pourquoi n'a-t-on jamais vraiment parlé publiquement du fond et des pièces du dossier qui démontrent l'inverse ?

Probablement parce que la famille du ministre s'est raccrochée à cette idée, aidée en cela par l'analyse des failles du dossier. Il est humainement compréhensible de douter, et même d'être dans le déni, du suicide d'un proche. Est-ce plus valorisant pour autant de soutenir la thèse d'un meurtre politique ? Je n'en suis pas persuadé. Mais pour les journalistes, les représentants de la société du spectacle, les gens avides de sensationnel, c'est évident !

Nous étions à l'aube d'une transformation radicale des rapports du pouvoir avec le droit, mais ce n'était pas encore totalement assimilé par les dirigeants de l'époque.

Robert Boulin a méthodiquement et froidement prévu son suicide. Lorsqu'on lit la lettre qu'il a posée à ses contacts pour expliquer son geste, on ressent la colère qu'il a emmagasiner et le seRobert Boulin a méthodiquement et froidement prévu son suicide. Lorsqu'on lit la lettre qu'il a posée à ses contacts pour expliquer son geste, on ressent la colère qu'il a emmagasiner et le sentiment d'injustice qui le ronge. Il a pris sa décision de manière courageuse et ne veut surtout pas donner l'éveil à sa famille et à ses proches. Le filme des derniers jours de sa vie, et surtout le dernier, témoigne de cette détermination et de cette concentration froides et terriblement calculées. le sentiment d'injustice qui le ronge. Il a pris sa décision de manière courageuse et ne veut surtout pas donner l'éveil à sa famille et à ses proches. Le filme des derniers jours de sa vie, et surtout le dernier, témoigne de cette détermination et de cette concentration froides et terriblement calculées.

La Crim', c'est de l'orfèvrerie, cela demande de la précision, cela repose sur le moindre détail ; le moindre écart, la moindre imperfection ou la plus petite imprécision, et vous payez cash aux assises, car la défense s'engouffre dedans. C'est normal d'ailleurs, et plutôt rassurant, dans l'exercice d'un procès pénal juste et équilibré, garant d'une société démocratique.

le pouvoir rend aveugle