Les historiens de. l'art, recherchant le maître dont Carpaccio reçut les premiers rudiments, firent du peintre le disciple tantôt de Vivarini, tantôt de Gentile Bellini. D'autre part, Vasari ayant indiqué, de façon manifestement erronée, que Carpaccio avait été le maître de ses deux frères, Lazare et Bastian, les historiens rectifièrent aisément l'erreur nominale, mais pour affirmer presque tous que le grand artiste eut pour disciple Lazare Bastiani. Un examen plus attentif de la question et la comparaison des dates et des faits d'après des documents inédits nous obligent à conclure que Bastiani ne fut pas le disciple ou l'imitateur, mais bien le premier maître de Carpaccio.
Au cours de leurs conquêtes, les Vénitiens avaient soin d'emporter dans leur patrie les dépouilles des vaincus : objets d'art, statues, colonnes, chapiteaux ; et, par de riches cadeaux, ils amenaient les maîtres mosaïstes grecs à travailler au temple de San Marco, sanctuaire de la patrie où se célébraient également les solennelles cérémonies du culte et les triomphes de la République. N'ayant pas de traditions artistiques, Venise accueillit celles de l'Orient et celles de l'Occident. Mais ce fut pour les faire siennes et pour donner un cachet national à l'art, qui se développa avec une magnificence partout ailleurs inconnue.