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Citation de brumaire


Dans la ville de brumes où j'ai grandi, mes parents avaient pour voisin un bonhomme qu'on appelait le père Gidrol.
C'était un de ces petits vieux à bancs, qui finissent de vivre le menton sur une canne en remâchant leurs souvenirs. Le père Gidrol, venu au monde l'année de Wagram allait sur ses quatre-vingt-dix ans.
- Nonante moins trois, disait-il, en secouant des cheveux de père noble.
Assez fier de clopiner encore autour du pâté de maisons, il s'arrêtait de porte en porte et faisait la causette en s'écoutant parler. A l'entendre, il lui était arrivé des choses extraordinaires. Mais pareil à tous les vieux, il ne se rappelait bien que ses jeunes années.
Personne dans le quartier n'écoutait plus les histoires du vieux père Gidrol, excepté mon père, qui dans les veillées campagnardes de son enfance avait pris le goût des traditions orales, et qui payait la goutte à l'ancien pour le faire parler.
Souvent le soir, après souper, Gidrol entrait en voisin dans notre boulangerie. Tandis que le vieux remuait l'humble brocante de son passé, mon père versait à boire en fumant sa pipe. On entendait de loin en loin retomber le marteau d'une porte cochère. Les heures sonnaient. La voix confuse divaguait doucement. J'étais là, sur ma chaise et, plein de fatigue et d'ennui, j'entendais les confidences du père Gidrol, toujours les mêmes, qui dans ma tête d'enfant finissaient par se mêler aux vibrations de l'horloge et aux brouillards du premier sommeil.
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