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Citation de Polomarco


Je n'ai jamais oublié la petite maison à l'ombre des arènes, la vieille école aux planchers effondrés, le visage si doux de ma mère, cette femme dénuée de toute méchanceté dont la vie, si courte, n'avait pas connu un instant de repos et si peu de bonheur, hormis celui qu'elle avait éprouvé en regardant grandir ses enfants.
Je n'ai jamais oublié la nuit où elle est morte, où mon cœur d'enfant a cessé de battre en moi à jamais. J'avais vingt-trois ans. Elle en avait quarante-trois. De cette mère qui, avec ma grand-mère, nous a élevés seule ma sœur et moi, j'ai gardé le souvenir d'une tendresse infinie et d'une dignité exemplaire. L'enfant que j'étais trouvait parfois cette dignité trop rigide, parce qu'il ne mesurait pas encore ce que représentait pour ces deux femmes l'orgueil de ne rien devoir à personne, ce "devoir d'orgueil", comme disait Philippe Seguin, qui les faisait tenir debout quand la vie était trop dure.
Je pleurais quand ma mère et ma grand-mère refusaient l'invitation qui m'était faite d'aller goûter chez le fils d'un médecin ou d'un avocat, parce que c'était une invitation que nous ne pouvions pas rendre.
C'est peut-être pour cela que je n'ai jamais supporté d'entendre dire que la pauvreté était la cause de la délinquance. On ne devient pas un voyou parce que l'on est pauvre. Chez les pauvres, on éduque souvent mieux les enfants que chez les riches. On leur apprend les valeurs de l'effort, du travail et de l'honnêteté. Il y a du mépris de classe dans le lien qu'établit une certaine gauche entre la pauvreté et la délinquance. Comment n'y verrais-je pas une insulte à ces deux femmes qui m'avaient élevé avec cette rectitude que l'on trouvait si fréquemment chez ceux que l'on appelait "les travailleurs", qui croyaient à la République et à l'école qui permettait à leur enfant de devenir quelqu'un, comme on disait alors. Leur amour pour leurs enfants se voyait aux sacrifices qu'ils faisaient pour eux et à la sévérité d'une éducation qui ne concédait rien à "l'enfant roi" auquel on passe tous ses caprices pour avoir la paix.
Je ne dois mes faiblesses qu'à moi-même, mais je ne dois qu'à l'éducation que j'ai reçue tout ce qu'il peut y avoir de bon en moi (pages 47-48-49).
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