Henri Mollaret

Que serait devenu Alexandre Yersin hors des Instituts Pasteur d'Indochine? Il serait probablement resté lui-même, imperturbablement, tournant cette page comme il avait tourné les autres après avoir été successivement bactériologiste, marin, explorateur. Pour devenir éleveur et agronome, il serait resté seul dans ses décisions, allant seul au bout de ses choix. Peut-être aurait-il vivement regretté de devoir quitter Nha Trang; mais il aurait pu mener la vie de tant d'autres colons, habitant l'arrière-pays et possèdant une villa au Bord de la mer, dans le port devenu station balnéaire.
L'une des chances de la vie de Yersin fut de n'avoir pas à faire ce choix. Entouré, soutenu par des hommes qui l'admiraient, le vénéraient et comprenaient son besoin d'indépendance, il a pu concilier les obligations de l'aventure, pour, finalement, le plus grand bien mutuel, les instituts d'Indochine conservant à leur tête l'homme le plus capable de les conseiller, connaissant le mieux la pathologie humaine et animale de la colonie, et Yersin trouvant dans les structures administratives existantes, les moyens de développer ses nouvelles recherches beaucoup plus largement que s'il s'était retrouvé seul.