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Citation de Charybde2


– Je suis juriste. Je vois la société comme un ensemble de contrats individuels, mais en interaction. Comme des réseaux d’engagements et d’obligations. La société est ça… » Elle lève son petit verre de genièvre au-dessus des lumières de la ville. « … en robe Nicole Farhi. Ce qui me gêne avec la démocratie, c’est que nous avons déjà un système plus efficace, selon moi. Votre développement basé sur les petits États terrestres était passionnant, mais la Lune n’est pas comme ça. Nous ne sommes pas un Etat : nous sommes une colonie économique. Si je devais faire une analogie avec la Terre, je choisirais plutôt quelque chose de clos et de contraint par son environnement. Un bateau de pêche en haute mer, peut-être, ou bien une base de recherches dans l’Antarctique. On est des clients, pas des citoyens. On est une culture de rentiers. On ne possède rien, on n’a pas de droits patrimoniaux, on est une société à petits enjeux. Qu’est-ce qui me motiverait à participer ?
« Le problème avec la démocratie, même directe et aussi élégamment construite que la vôtre, ce sont les parasites. Il y a toujours des gens pour refuser de s’impliquer, mais qui ne refusent pas les avantages générés par ceux qui se retroussent les manches. Si je pouvais me comporter en parasite sans m’attirer d’ennuis, je ne me gênerais pas. J’ai uniquement accepté d’intégrer le pavillon du Lièvre variable parce que je croyais que ça m’aiderait à progresser à la cour de Clavius. Juge Ariel Corta, ça sonne bien. On ne peut pas obliger les gens à s’engager politiquement… ce serait de la tyrannie. Dans une société où s’impliquer ne rapporte pas grand-chose, on se retrouve avec une majorité de profiteurs et une petite caste politique engagée. Laissez la démocratie à ceux qui souhaitent s’y exercer et vous n’échapperez pas à l’apparition d’une classe politique. Ou pire, d’une démocratie représentative. Pour l’instant, on a un système de responsabilité auquel tout le monde est soumis sur la Lune. Notre système juridique rend chaque humain responsable de sa vie, de sa sécurité et de sa prospérité. Il est individualiste, individualisant et sévère, mais il est compris. Et les limites sont claires. Personne ne prend de décisions ou n’assume de responsabilités pour autrui. Il ne reconnaît ni les groupes, ni les religions, ni les factions, ni les partis politiques. Il y a des individus, des familles et des entreprises. Les universitaires terriens qui viennent à Farside roulent des yeux désapprobateurs en nous traitant d’individualistes sans merci qui n’ont pas la moindre notion de solidarité. Mais on a bel et bien ce qu’ils appelleraient une société civile. Sauf qu’on trouve préférable de recourir à la négociation plutôt qu’à la législation. On est des barbares frustes et rancuniers. Ça me plaît assez.
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