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Citation de enkidu_


En dehors des principes dogmatiques, il ne s'agit donc que de différences rituelles tout à fait négligeables et telles qu'il s'en rencontre en grand nombre dans les Madahib orthodoxes. Il y a en tout, paraît-il, 17 questions de détail pour lesquels la loi chi'ite adopte une solution particulière et n'est pas d'accord avec l'un ou l’autre des madâhib orthodoxes.

La plus profonde différence de doctrine entre la loi sunnite et la loi chi'ite apparaît dans le domaine du droit matrimonial. Elle est, en tout cas, d'un plus grand poids pour notre considération et notre appréciation du chî'isme que ces insignifiantes divergences rituelles qui se manifestent dans l'accomplissement des pratiques religieuses.

C'est notamment une question de droit matrimonial qui mérite à ce point de vue d'attirer notre attention : la validité ou l'invalidité du mariage contracté pour une durée limitée, du mariage temporaire.

Dans la République de Platon, et sous l'influence de considérations qui, à la vérité, diffèrent radicalement de celles que l'on peut faire valoir dans la vie musulmane, le mariage temporaire est aussi admis parmi l'élite de la société que le philosophe désigne sous le nom de « gardiens ». Theodor Gomperz a cité des faits analogues tirés des mouvements sociaux de la Nouvelle-Angleterre : la secte des « Perfectionnistes », fondée par John Humphrey Noyés, qui eut son siège principal à Oneïda pendant la durée d'une vie humaine et dont les conceptions matrimoniales ont été depuis lors reproduites dans la littérature narrative (trial marriage).

Ce fut naturellement en vertu d'autres motifs que Muhammed, au début de sa carrière de législateur, toléra une forme de mariage usitée dans l'Arabie païenne (ce dont témoigne Ammien Marcellin) et dont le nom technique (mut'a) se traduit littéralement par mariage de jouissance mais que nous préférons appeler mariage temporaire. A l'expiration du délai fixé lors de la conclusion (sîgha) d'un tel mariage, sa validité cesse ipso facto conformément à la convention et sans aucune formalité de séparation. La validité de cette forme de mariage fut cependant abrogée au bout de quelques années : les traditions rapportent, les unes que c'est le Prophète lui-même, les autres — ce qui est plus vraisemblable — que c'est seulement 'Omar qui déclara qu'une telle union temporaire était « sœur de la débauche » et l'interdit aux croyants. Mais, même après cette prohibition, il y en eut encore dans une mesure restreinte (par exemple à l'occasion des pèlerinages). Comme l'autorisation du mariage mut'a se base sur un hadït qui remonte à Ibn 'Abbâs, on l'a appelé par dérision « un mariage à la façon de la fetwa d'Ibn 'Abbâs ».

Les Sunnites à mesure que se consolidaient les institutions musulmanes, se sont ralliés à l’interdiction du mariage temporaire, tandis que les chï'ites, s'appuyant sur le Qorân (surate 4, verset 28), considèrent encore aujourd'hui comme valable un mariage de ce genre. Son abolition par le Prophète n'est pas, d'après eux, attestée d'une façon digne de foi. La validité de la mut'a a, disent-ils, été abrogée à tort par 'Omar, un homme qu'ils ne reconnaissent point comme autorité légale, les traditions qui rapportent sa décision méritassent-elles créance.

C'est là la question de droit sur laquelle nous devons considérer que le désaccord est le plus profond entre l'Islam sunnite et l’Islâm chî'ite. (pp. 191-192)
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