à Stéphanie
Un petit miracle cette correspondance en est un, puisqu'elle débute par hasard, Madeleine Allain recevant une lettre écrite par Ilo à l'intention du philosophe Alain. Ainsi débute un échange de lettre d'une qualité remarquable, d'une beauté limpide, entre un homme engagé volontaire dans la Légion étrangère et Madeleine qui lui écrit depuis Paris. Il ne se sont jamais rencontrer, restant à jamais dans un entre-deux, oscillant entre amour et amitié, quel est le mot pour ça, mettre un terme sur un sentiment impalpable mais où l'on peut sentir le sang qui tambourine sous l'encre asséché et dans chaque fibres de papier, est-ce seulement possible ?
"N'importe. Je crois qu'il ne faut jamais se faire plus grave que ce qu'on est - et avec vous je veux être simplement tel que je suis dans le moment où je vous parle".
Ici tout est beauté, les lettres en provenance d'une grande solitude, exprime une émotion d'une rare pureté, et jusque dans la qualité de l'écriture, qui écrit encore comme cela de nos jours ? De ce désert chauffé à blanc, nous avons la chance de pouvoir lire un échange sincère et limpide comme le cristal.
"Et j'ai vécu. Et je n'ai pas renié le bonheur. Je l'ai épié toute ma vie, je lui ai toujours gardé sa place. Mais celui qui est venu, c'est le bonheur qui est au-delà, qui voit toutes choses, qui se tait et qui s'ignore. Un bonheur qui touche aux berceuses de la terre, au grand ciel, aux grands sables. (...) qui est pour un seul (sauvé ? perdu ?), et qui se tient un peu plus haut que la tristesse".
J'ai lu, et relu, ce petit livre magique, avec d'autant plus d'attention, et d'émotion, qu'il m'avait été offert par une amie aujourd'hui disparue, mille mercis à elle pour ce cadeau inestimable, je les lui adressent à présent, même si elle ne peut plus les recevoir, que dans les limbes des souvenirs ensoleillés que je garde d'elle, au plus profond de moi.
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Ce petit livre, dès ma première lecture m'a intrigué: ne s'agit-il pas d'une mystification littéraire: il est hautement improbable que le manuscrit réexpédié par la poste à Emile Chartier (le véritable nom d'Alain) aboutisse chez Madeleine Allain, qui habite sans doute une autre rue, un autre quartier. Ensuite Ilo est sensé avoir rencontré italo Svevo, Joyce, Kafka, Rilke, Zweig, Schnitzler, Broch, Malaparte, Istraki, du Gard, Gide, Valéry, Rolland, Mauriac, Malraux, St John Perse,etc. Jamais dans la lecture de ses auteurs ou chez leurs biographes je n'ai trouvé la moindre mention d'Ilo...
Dans sa postface Gérard Chaliand écrit: "Ilo de Franceschi est un personnage semi-mythique. Il n'avait pas d'identité juridique. Pas de papiers, pas de sécurité sociale, pas de travail-pas d'existence légale en somme." Troublant!
L'édition 2018 de "Ecrivez-moi Madeleine" porte dans le coin droit de la couverture la mention Roman. Le nom de Gérard Chaliand apparaît avant celui d'Ilo de Franceschi mentionné seulement par " avec la contribution de"
Pour moi G. Chaliand est bien l'auteur de ce recueil. Je lui ai écrit. Il assure que ces lettres d'Ilo ont bien été déposées aux éditions l'Aube par Madeleine Allain, sans donner davantage de précisions
Pour moi le mystère n'est pas résolu.Reste que ce texte est d'excellente qualité littéraire.
Je serais heureux si d'autres Babéliens se penchaient sur la question et apportaient leur lumière.
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