J. Delcroix

D'un coup, elle (Mamma Mancini) se met à froncer les sourcils et à regarder par-dessus mon épaule. J'ai mon instinct qui me dit "ne bouge pas ou tu vas te faire tuer", je reste alors aussi droite qu'une statue. Quand elle se met à parler, c'est moi qui commence à froncer.
- Ah te voilà, où étais-tu ?
- Désolé, grand-mère, j'étais occupé, j'espère que tu n'as pas eu trop de clients.
Une voix masculine ? J'hésite à me retourner, car je veux quand même voir à quoi ressemble le nouvel arrivant, mais le regard que lui porte sa grand-mère me dit de rester à ma place. [...]
Je décide enfin de me tourner complètement pour voir le petit-fils de la gérante. À mon étonnement, je pensais qu'il était plus jeune. Quand on me dit petit-fils, j'ai le visage en tête d'un adolescent de quinze ans, mais je me suis trompée. Il a étonnement... une prestance. Du moins, quelque chose qui s'en rapproche. Il me dévissage des pieds jusqu'à la tête et son regard s'arrête sur mes cheveux. Pourquoi cet endroit là ? Il a de magnifiques yeux bleus, il est même très élégant dans sa chemise quand je le compare à sa grand-mère.

"Il Magnifico" c'est le nom le plus... décevant que j'ai rencontré dans ma vie pour un hôtel. Il aurait pu s'appeler "Il Maestosos" ou "Dormiamo e basta", non ? En fait mes propositions sont encore moins originales que le nom initial. Je n'ai jamais été douée là-dedans, je ne sais même pas pourquoi je donne mon point de vue.
De toute façon, avec ce qu'il m'est arrivé depuis deux jours, je ne suis pas à ça près. J'emménage enfin dans un hôtel après avoir passé une nuit dehors. Je ne suis pas lavée, je suis pleine de poussières et cette nuit, j'ai trouvé le banc tellement inconfortable que j'ai sûrement la trace des planches de bois dans mon dos. Je n'ai rien fait pour mériter ça. Je suis irréprochable, de bonne famille, j'ai toujours respecté les règles, mais si mes parents me voyaient en ce moment, ils demanderaient sûrement à ce que je change de patronyme...