Poésies de la guerre
III
Face à la palme de feu
tracée par le soleil, au couchant,
dans le soir silencieux
et dans ce jardin de paix
tandis que Valence fleurie
s’abreuve au Guadalaviar
– Valence aux sveltes tours
dans le ciel lyrique d’Ausias March,
sa rivière changée en roses
avant de se perdre dans la mer ! –
je pense à la guerre.
La guerre survient comme un ouragan
par les landes du Haut Duero,
par les plaines de moissons
depuis l’Estrémadure fertile
jusqu’à ces orangeraies,
du ciel gris des Asturies
aux marais de lumière et de sel.
Je pense à l’Espagne, vendue à l’encan,
de fleuve en fleuve, de montagne à montagne, de mer à mer.
//Antonio Machado (1875 – 1939)