AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de enkidu_


La résistance désespérée, folle, catastrophique d’Hitler, au moment où, de toute évidence, tout est perdu, ne s’explique que par l’attente du déluge décrit par les horbigériens. Si l’on ne pouvait retourner la situation par des moyens humains, il restait la possibilité de provoquer le jugement des dieux. Le déluge surviendrait, comme un châtiment, pour l’humanité entière. La nuit allait recouvrir le globe et tout serait noyé dans des tempêtes d’eau et de grêle. Hitler, dit Speer avec horreur, « essayait délibérément de tout faire périr avec lui. Il n’était plus qu’un homme pour qui la fin de sa propre vie signifiait la fin de toute chose ». Goebbels, dans ses derniers éditoriaux, salue avec enthousiasme les bombardiers ennemis qui détruisent son pays : « Sous les débris de nos cités anéanties, les réalisations du stupide XIX e siècle sont enterrées. » Hitler fait régner la mort : il prescrit la destruction totale de l’Allemagne, il fait exécuter les prisonniers, condamne son ancien chirurgien, fait tuer son beau-frère, demande la mort pour les soldats vaincus, et descend lui-même au tombeau. « Hitler et Goebbels, écrit Trevor Roper, invitèrent le peuple allemand à détruire ses villes et ses usines, à faire sauter ses digues et ses ponts, à sacrifier les chemins de fer et tout le matériel roulant, et tout ceci en faveur d’une légende, au nom d’un crépuscule des dieux. » Hitler demande du sang, envoie ses dernières troupes au sacrifice : « Les pertes ne semblent jamais assez élevées », dit-il. Ce ne sont pas les ennemis de l’Allemagne qui gagnent, ce sont les forces universelles qui se mettent en marche pour noyer la terre, punir l’humanité parce que l’humanité a laissé la glace l’emporter sur le feu, les puissances de la mort l’emporter sur les puissances de la vie et de la résurrection. Le ciel va se venger. Il ne reste en mourant qu’à appeler le grand déluge. Hitler fait un sacrifice à l’eau : il ordonne que l’on noie le métro de Berlin, où 300 000 personnes réfugiées dans les souterrains périssent. C’est un acte de magie imitative : ce geste déterminera des mouvements d’apocalypse dans le ciel et sur la terre. Goebbels publie un dernier article avant de tuer, dans le Bunker, sa femme, ses enfants et de se tuer lui-même. Il intitule son éditorial d’adieu : « Et quand même cela serait. » Il dit que le drame ne se joue pas à l’échelle de la terre, mais du cosmos. « Notre fin sera la fin de tout l’univers. » (pp. 403-404)
Commenter  J’apprécie          10





Ont apprécié cette citation (1)voir plus




{* *}