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Citation de SZRAMOWO


Mais pourquoi se faire économiste ?
Que diable allait-il faire dans cette galère ?
Correspondance de l’abbé Galiani avec Mme d’Épinay
(à propos du renvoi de Turgot)

La pensée économique jouit dans notre société d’un très curieux statut. D’un côté, elle fait partie des outils indispensables pour comprendre le monde contemporain. Les institutions internationales, les gouvernements, les banques, les partis politiques, les organisations syndicales s’entourent d’une multitude d’« experts », dont les interventions sont constamment sollicitées par les médias. Ce sont des experts reconnus, mais ils sont souvent en désaccord entre eux et on leur reproche leur arrogance, ce qui n’est pas porté au crédit de la profession. D’un autre côté, le contenu et les méthodes de ce que l’on appelle souvent les « sciences économiques » sont à la fois largement méconnus, parce que trop techniques, et sévèrement jugés parce que « détachés des réalités » ou, pire, dénoncés pour leur soumission supposée à des intérêts peu avouables. Ainsi ce qui constitue depuis quatre siècles une discipline intellectuelle riche et vivante paraît-il souvent confiné à un cercle de spécialistes protégés par leur tour d’ivoire à moins d’être réduit à un recueil d’arguments convenus, mobilisables à la demande sur le front idéologique et médiatique. L’économie, il est vrai, tient moins que ce qu’elle promet parfois un peu hâtivement, mais la pensée économique souffre, en particulier en France, d’un discrédit qu’elle ne mérite pas. Ce livre peut être lu comme un hommage aux géants dont la pensée a construit cette discipline. Nous leur devons les instruments qui nous rendent aujourd’hui accessible la compréhension de l’univers économique de même que les physiciens nous rendent accessible la connaissance de l’univers. D’où leur est venue l’audace de construire cette « science de la richesse » ? Comment ont-ils donné corps à cette ambition ? L’activité des hommes en société forme un tout, mais les sciences humaines forment un ensemble hétérogène. On ne peut se spécialiser dans l’une d’entre elles sans établir dès le départ les passerelles permettant la poursuite de questionnements amorcés depuis l’Antiquité. L’économie, en particulier, se conçoit mal si elle n’entre dans un dialogue étroit avec l’histoire, la géographie, le droit, la science politique et la philosophie ; les relations avec d’autres disciplines comme l’anthropologie ou la sociologie sont plus tendues, ce qui ne tient pas à la nature des choses, mais à la posture dite « critique » qui y a prospéré. Quoi qu’il en soit, on ne peut qu’être frappé par le climat de suspicion qui entoure fréquemment les pratiques des économistes. Ils n’ont parfois qu’eux-mêmes à blâmer lorsqu’ils donnent l’impression d’une science facilement satisfaite d’elle-même et peu portée à partager ses trésors formels hors de la profession. Pourtant, bien des critiques adressées à la méthode et au raisonnement économiques apparaissent, à la réflexion, mal inspirées et peu constructives.
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