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Citation de Le_Marre_Patrick


Myra Hogan descendait la grand'rue , consciente de toutes les têtes qui se retournaient sur son passage. Les noirs eux mêmes s'arrêtaient dans leurs travail, craignant de relever la tête, mais lui jetant par en dessous des regards furtifs.
Elle marchait, ses hauts talons de bois claquant comme un défi. Les hommes la guignaient et la déshabillaient des yeux sur son passage.
Les femmes la regardaient elles aussi. Avec des yeux froids, chargés d'envie et de haine. Myra roulait légèrement les hanches. Elle prit une démarche affectée, tout en lissant ses boucles noires. Son corps jeune et ferme, libre de toute entrave, ondulait harmonieusement. Ses jeunes seins épanouis tressautaient sous le mince voile de sa petite robe imprimé.
A l'autre bout de la rue, un groupe de commères jacassait, déchirant les gens en mille morceaux sous le soleil brûlant. Elles virent Myra s'approcher et se turent brusquement; c'étaient de vieilles femmes sans formes, épuisées par les maternités et les travaux manuels. Myra se raidit en s'approchant d'elles. Un instant, sa démarche perdit son balancement rythmé. Les talons de bois claquèrent avec moins d'assurance. Sa confiance en elle-même ne reposait pas sur des bases solides; elle était encore très jeune. Au milieu de ses aînées, elle devait se forcer.
Un sourire contraint sur ses lèvres pleines, elle avança. Mais, à son approche, Les commères se reculèrent comme une couvée de vautours et ne lui montrèrent que leur dos vouté, sans la regarder de leurs yeux vides. De nouveau, les talons de bois claquèrent. Le sang aux joues, la tête haute, Myra passa.
Derrière elle, les voix se remirent à bourdonner. L'une des femmes s'écria très fort :

- J'lui ferai voir...à cette sale petite trainée !

Myra poursuivit sa route. "Les vieilles garces, pensait-elle, furieuse. Moi, j'ai tout, elles ne peuvent pas me sentir."
La route était longue jusque chez elle. Elle ne fut pas fâchée d'atteindre enfin la petite barrière de bois qui ouvrait sur l'allée conduisant à la bicoque délabrée.
Elle s'arrêta à la barrière, et examina la maison. Elle pensait : "Je la déteste ! je la déteste !"
Le jardin n'était que boue craquelée, cuite et recuite. La maison surélevée, sans étage, était entièrement faite de bois gauchi par le vent et la pluie et blanchi par le soleil. Elle se dressait comme un symbole affreux et déprimant de pauvreté.
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