Le cristal de lithium
Extrait 7
Dans un décor de feuilles, une arrière-boutique, une maison sur
la colline admirée pour être
Un peu plus ancienne que d’autres (et plus jolie ?), un homme en
tablier blanc embrasse une voiture
Du regard brièvement dans le froid comme quelqu’un s’étreignant
lui-même pour trouver chaleur ou amour
‒ Quel travail de peinture, lisse comme une aubergine ; quelle carcasse
riche en viande , lisse comme une aubergine
‒ Est-ce trop demander à notre voiture qu’elle nous comprenne ?
L’inverse ne l‘est pas et le ciel
Cartographie de nouvelles routes, si bien qu’en conduisant
perpendiculairement au vent, les rangées de nuages
Parviennent à diminuer la perspective, partie d’une carte postale
eprésentant une peinture
Au-dessus des broussailles d’un chêne où une station-service possède :
essence, toilettes verrouillées (pour conserver la saleté)
Un distributeur de boissons gazeuses bouzillé, aucune carte et
“Je pourrais pas vous dire où c’est” ainsi
Le ciel se réduit à une couleur, là où la flaque d’hier
Offre son hospitalité aux détritus humains et naturels, dans leurs
bronzages et argentés
Et ces gravillons noirs dans les coins d’une pièce dans tel ou tel
tas de déchets
Où la lampe du plafond brûle nuit et jour et nous regardons
chacun vers ou dans
Les yeux de l’autre avec l’espoir que l’autre y lira bien ce qu’il
lit là : la neige, un vent
Soulevé ; l’eau noire, cisaillée de blanc ; et ce qui est, ce qui est
au delà
Du bonheur ou de l’amour ou mêlé à eux ou plus qu’eux ou
moins, l’inchangeant changement
“Regarde” disait l’océan (il était secoué, comme nos draps)
“regarde dans mes yeux”
//Traduit de l’anglais (américain) par Jean-René Lassalle.