Je peux aussi citer la fameuse réponse d'Einstein aux professeurs qui encadraient le travail de Louis de Broglie - il avait découvert la nature ondulatoire des électrons - et lui demandaient, si à son avis, ce dernier avait assez de résultats pour passer sa thèse: " Chers collègues vous devriez vous hâter sinon il va recevoir le prix Nobel avant que vous lui accordiez celle-ci." Ce qui faillit arriver.
Quand Albert Einstein sort diplômé du Polytechnicum de Zurich, son bulletin mentionne qu'il est inapte à la recherche et à l'enseignement. Il prendra un emploi à l'Office des brevets à Berne pour gagner sa vie et, pendant cette période, publiera ses articles sur la relativité qui bouleverseront la physique moderne.
Je suis toujours frappé par le paradoxe schizophrénique entre la vie privée plutôt spartiate d'un chercheur avec sa famille, et celle dispendieuse qu'il vit au laboratoire. Son budget familial va être perturbé si son réfrigérateur rend l'âme alors que, le même jour, il va commander pour 10 000 euros d'anticorps et discuter avec ses collègues l'achat d'un nouveau trieur de cellules à plusieurs centaines de milliers d'euros. On a du mal à comprendre une telle politique de paupérisation de la matière grise qui pourtant se poursuit, depuis des années, que les gouvernants soient de droite ou de gauche.
La théorie de la Pangénèse ne survivra pas aux travaux des fondateurs de la génétique moderne, et à une expérience menée par le propre cousin de Darwin, Francis Galton, qui transfusa du sang de lapins blancs à des lapins gris... Les descendants restèrent gris.
Une autre différence me frappait: tout le système reposait sur la méritocratie et l'encouragement. Un exemple: le jour de mon arrivée, le département de biochimie avait organisé un pot et le chef avait fait un petit discours, pour dire à quel point ils étaient flattés d'avoir recruté un jeune homme aussi brillant, en l'occurrence moi. J'étais sidéré et pensais que je m'étais trompé de salle.