Jean Mallinger

C'est surtout la richesse spirituelle du Pythagorisme que nous découvrirons dans les vieux textes.
Certains universitaires ont déjà dégagé la figure du Maître, des brumes de la légende. Cherchons à rencontrer le grand Thaumaturge, dans le Naos même de son Temple. Allons à lui, comme le firent tant d'adolescents de Grande-Grèce : avec un coeur pur, avec le désir fervent de trouver la Vérité et de faire notre salut.
Nous percevrons aussitôt sa présence, et, avec celle-ci, sa réponse.

Dès son arrivée à Crotone, Pythagore comprit que l'heure était venue de commencer sa mission terrestre. Il dira un jour de ne point cacher la lampe sous le boisseau, de ne point éteindre le falmbeau contre la muraille. Il commencera donc sa prédication. Car l'éloquence est le premier outil mis par les Dieux à la disposition des hommes et elle peut faire tant de bien... Il existe tant d'êtres qui sont malheureux uniquement parce qu'ils ignorent qu'il existe des remèdes à leur maux.

Les Grecs ont toujours -dans leurs légendes nationales- attribué une origine surhumaine à leurs grands hommes ; elon eux, le Ciel s'intéresse aux misères du monde et lui délègue, de temps à autre, un Messager, qui s'annonce par certains signes.
Pythagore n'échappa point à cette règle. Ses biographes nous racontent que son père, Mnésarque, ayany consulté la Pythie sur un voyage qu'il comptait entreprendre en Syrie, reçut la réponse suivante : "Il sera très heureux et lucratif. En plus, ta femme, Parthénis, donnera le jour à un enfant merveilleux de beauté et de sagesse. Il comblera de bienfaits le genre humain." (Jamblique)
A la suite de cet oracle, il appela sa femme : Pythais et lorsque l'enfant naquit, il lui donna le nom de "Pythagore" : c'est-à-dire "celui qui a été annoncé par la Pythie".
Ses plus fervents disciples exagéreront encore la légende. Ils affirmeront plus tard que leur maître était en réalité soit Apollon réincarné soit le fils d'Apollon ; le dieu solaire aurait touché Pythais d'un rayon sacré ; aussi l'âme de Pythagore fut-elle détentrice d'un effluve céleste ; sa mère lui avait donné une "Psyché" terrestre, soumise aux épreuves humaines ; mais le Dieu de la lumière et de la vie, l'avait doté d'un "Nous" particulier, riche en illumination intérieure et seconde-vue.

Tous les grands hommes de la Hellade iront chercher la lumière en Egypte : Thalès, Lycurgue, Solon y précéderont Pythagore et Platon.
Herodote fera, par après, la description de toutes les merveilles dont il fut le témoin occulaire. Tout l'étonne là-bas: la division du peuple en sept classes ; sa piété ; sa sollicitude infinie envers le smorts ; son respect des animaux ; les vêtements de ses prêtres ; le faste et le symbolisme de ses imposantes manifestations religieuses.

Le long séjour de Pythagore en ce pôle spirituel du monde ancien est cetres significatif. Il prouve l'étendue considérable du savoir égyptien que le jeune Samien dut s'assimiler, par le travail des initiations successives, dans les centres classiques de l'ésotérisme.
Lorsque nous le verrons plus tard briller non seulement en métaphysique mais aussi en astronomie, en acoustique et dans la science des Nombres, nous devrons en inférer que l'enseignement de l'Egypte comportait un bon nombre de sciences exactes, premiers fondements de la science de la Nature.

Lorsqu'il étudie la vie et les enseignements de Pythagore, l'homme des temps présents ne peut se défendre contre la fascination qu'exerce sur lui cette personnalité, si riche en révélation de toutes sortes, pénétrée à la fois de maturité scientifique et de vivant idéalisme.
C'est que Pythagore répond, de façon étonnante, à toutes les questions, à toutes les exigences que pose l'angoisse contemporaine : les épreuves de la vie ont pour effet de forcer l'homme à rentrer en lui-même ; elles le mettent en état de percevoir, par résonnance, les vérités naturelles ; elles lui font chercher, pour s'y désaltérer, les claires fontaines spirituelles.

Les auteurs discutent entre eux la date de son départ pour l'Egypte. (...)
Mais il ne peut être contesté que Pythagore résida longtemps -près de vingt deux années- en Egypte et s'initia parfaitement à la langue et à l'écriture du pays. (...)
La vieille civilisation égyptienne, qui avait depuis longtemps connu son apogée, exerçait encore une vive attraction sur le jeune monde hellénique. Ses monuments aux proportions colossales, sa haute culture religieuse, ses Mystères antiques, ses admirables liturgies, sa culture scientifique -attestée par de nombreux papyrus astrologiques et médicaux- frappaient les Grecs d'un légitime étonnement.

Sur son enfance studieuse, nous possédons beaucoup de renseignements. Son père lui réserva les meilleurs précepteurs de son siècle.
Hermodamas lui apprit les poèmes du vieil Homère ; il se plaisiat à les cahnter, en s'accompagnant de la lyre.
Phérécyde de Scyros -qui fut le premier prosateur grec- l'initia aux traditions de l'Orphisme, relatives à la dualité de l'être humain et à l'immortalité de l'âme. (...)
Nous savons encore que dès sa jeunesse, Pythagore manifesta une singulière gravité ; il garda tojours un visage serein ; on ne le vit jamais rire aux éclats ou céder au feu de la colère.

Pythagore est, pour nous, le grand propagateur des Mystères sur le continent européen ; il est le premier chaînon, qui relie systématiquement et directement ce dernier aux Collèges sacerdotaux de l'Egypte. Il crée sur notre sol le premier Institut des Sges et des Nomothètes ; il établit à Crotone cette Ecole de chefs, qui deviendra un centre permanent d'Initiation Traditionnelle. Il lui donne à la fois une liturgie nouvelle, génératrice d'une vive radiation spirituelle, et un ensemble précis de dogmes confidentiels, condensant symboliquement l'essentiel de la Doctrine secrète.

Si les découvertes mathématiques du Maître de Samos sont fort connues et si tout le monde a lu le transcendant Message éthique que constituent ses "Vers Dorés", le rôle de Pythagore, dans la propagation des Mystères Traditionnels et dans leur révélation est demeuré, en grande partie, ignoré. (...) ; en matière initiatique, tout est symbole, allégorie et parabole ; l'ensignement s'est transmis fidèlement, de maître à disciple et de bouche à oreille. Le voile des initiés a précieusement dérobé les Mystères aux curiosités des profanes.