Dans Paris enfiévré, on suivait les progrès de l’offensive de Normandie. Le fameux débarquement depuis si longtemps espéré s’était enfin accompli. Dehors, sur les grands boulevards, aux terrasses des cafés, nul ne parlait, mais on ne surprenait pas sur les visages que des expressions d’espérance et d’allégresse… Les Allemands qu’on croisait faisaient piteuse mine. Les temps semblaient révolus de l’occupation fraîche et joyeuse.
Pourtant la menace pesait toujours sur la ville. Chacun connaissait les Barbares, et l’on s’imaginant alors que Londres, Berlin et presque toutes les autres capitales de l’Europe avaient payé un lourd tribu à la guerre, que Paris serait condamné à son tour !... L’ennemi partirait, mais il ne laisserait derrière lui que des ruines fumantes, comme à Varsovie…
Il était dur de trouver de quoi subsister à cette époque ! Attentes interminables devant les magasins d’où l’on revenait souvent sans rien avoir trouvé, formalités qui n’en finissaient plus, incertitudes sans bornes sous les yeux d’un occupant de plus en plus hargneux et rendu de plus en plus inquiet par la tournure qu’empruntaient les événements !