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Citation de Charybde2


Un mot encore sur la notion de « basculements », qui donne son titre à ce livre. L’événement coronavirus en suggère un premier sens : on a soudainement basculé dans une autre réalité, inimaginable quelques semaines auparavant. Le terme exprime l’imprévisibilité et la brutalité d’un événement aux effets puissants. Son usage s’impose donc, dans une période où toute stabilité apparente n’est que le masque d’une profonde instabilité. Plus précisément, si l’on admet que les équilibres apparents cachent des déséquilibres latents, ils peuvent à tout moment pencher dans un sens ou dans un autre – de faibles modifications dans les conditions initiales suffisant à entraîner des mouvements considérables, avec diverses trajectoires possibles et largement divergentes. C’est cela que la notion de « basculements » permet de signifier : une dynamique aussi indécise et incertaine dans son déclenchement et son orientation qu’ample et massive, une fois enclenchée.
On ne cachera pas que cette notion entend faire pièce à celle d' »effondrement », dont le succès récent, promu par la « collapsologie », est à certains égards préoccupant. On y reviendra dans le chapitre 1, mais on peut souligner déjà que, là où la notion d' »effondrement » suggère un processus inéluctable et fatal, celle de « basculements » privilégie l’incertitude. Et là où l’effondrisme collapsologique propose un récit unique, la notion de « basculements » permet d’envisager une pluralité de scénarios. Pour autant, il ne s’agit nullement de minimiser l’ampleur des catastrophes en cours, ni celle des bouleversements potentiels. De ce point de vue, la notion de « basculements » a l’avantage de faire place à des dynamiques très diverses : situations incertaines et multiplicité des scénarios possibles ; effets de seuil entraînant des accélérations soudaines, voire de brusques retournements de tendance ; mouvements de grande ampleur, assimilables à des glissements tectoniques, etc.
Parler de basculements permet d’amplifier l’ouverture des possibles. Cela invite à reconnaître que, en situation d’instabilité, des possibles opposés peuvent également gagner en probabilité. Et cela contribue à conférer quelque crédibilité à l’hypothèse d’un basculement vers des mondes postcapitalistes qui, certes, peuvent paraître lointains et n’ont rien de certains, mais se laissent cependant entrevoir à travers des dynamiques déjà émergentes. Pour le dire d’un mot, sans doute trop rapide : tout peut basculer, mais rien n’est assuré. Et du moins pouvons-nous nous soucier d’établir quels sont les possibles concrets et désirables à la matérialisation desquels nous souhaitons apporter nos forces.
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