L'équation prison/probation ne se pose pas en termes de ou bien l'une ou bien l'autre, comme s'il y avait là un choix exclusif. En définitive, il s'agit toujours des deux à la fois : et de l'une et de l'autre. Ainsi, la probation n'est pas vécue comme une alternative à l'incarcération et la situation des probationnaires peut s'apparenter à une sorte de vibration complexe entre la prison passée, la probation présente, la prison qu'on aurait pu choisir à la place, la prison que l'on risque en plus de la peine actuelle, voire la probation qui suivra la prison qui reviendra de l'intérieur de la probation, et ainsi de suite. (p. 162)
Les mesures de probation se présentent comme des alternatives à l'incarcération mais elles concernent en fait des catégories socio-pénales qui étaient condamnées à des peines moins contraignantes par le passé. [...] Ce constat du rôle de la probation dans l'extension du filet pénal est aujourd'hui partagé comme une évidence par les spécialistes du domaine, même si l'illusion de la probation comme alternative continue d'occuper l'espace public et médiatique. (p. 27-28)
Vue à partir de la prison, la probation est vidée de tout contenu et n'apparaît que comme une porte de sortie. Mais évaluée à partir du vécu qu'elle impose, la probation prend la consistance d'une carcéralisation très particulière de la vie quotidienne [...]. (p. 141-142)
La prison est une expérience très dure, mais circonscrite dans le temps et l'espace, ce qui permet, dans une certaine mesure, de contenir l'emprise existentielle de l'épreuve pénale. Tel n'est pas le cas de la probation qui suit le condamné comme "son ombre". (p. 153)
En écoutant les premiers concernés, nous comprendrons qu'être en probation n'est pas une manière d'en avoir fini avec la prison, au contraire. La menace de l'enfermement ne cesse de hanter le quotidien et siphonne une grande part du sens de l'accompagnement. (p. 17)