Johanna Lynn

— Je ne te comprends pas. Tu sais. Tu me connais, je t’ai raconté toutes les choses qui sont allées de travers dans ma vie, tous les trucs sordides par lesquels je suis passé… Je veux dire, même ma meilleure amie n’en sait pas autant.

Lélio se rend compte que c’est la première fois qu’il fait allusion à Nancy devant Nate, mais il poursuit.

— En sachant tout ça, comment est-ce que tu peux encore penser ce genre de chose ?

Il sent que Nate le serre plus fort dans ses bras et se laisse aller dans son étreinte avec reconnaissance. — Est-ce que tu sais d’où viennent les perles, Lélio ?

— Hein ? Les quoi ?

Qu’est-ce que ça vient faire là ?

— Les perles. Tu sais d’où elles viennent ?

Lélio résiste à l’envie de s’écarter pour voir s’il ne se moque pas de lui, mais il est trop bien là, alors il se contente de répondre.

— On en trouve dans les huîtres.

— Oui. Mais tu sais comment les huîtres les fabriquent ?

Lélio hausse les épaules. Il ne s’est jamais intéressé aux bijoux, pas plus qu’aux fruits de mer.

— Une huître, c’est fermé – et bien fermé, explique Nate. Une vraie galère à ouvrir. Mais parfois, il y a une petite ouverture. Minuscule, mais suffisante pour que quelque chose parvienne à entrer à l’intérieur. Un grain de sable. Quand ça arrive, l’huître enclenche un mécanisme de défense qui lui sert à assimiler ce corps étranger, parce qu’elle ne peut pas l’expulser. Et pour ce faire, elle le recouvre de nacre. Des couches et des couches de nacre, jusqu’à ce que ce que le grain de sable se transforme en perle.
— Où est-ce que tu veux en venir ?
— C’est un déchet, Lélio. Un grain de sable indésirable caché dans un joyau hors de prix. Mais sans cette petite saleté, les perles n’existeraient même pas. Il y a plein de gens qui ne se rendent pas compte qu’en luttant contre les choses moches qui salissent leur passé, ils sont devenus des personnes meilleures. Et toi, tu es la plus magnifique perle que j’ai jamais vue. Tu as traversé des horreurs, j’en suis conscient, mais ce n’est pas ce que tu es. Tu t’es construit autour, en te battant pour les surmonter, et ça a fait de toi celui que tu es maintenant, et que j’aime parce que je ne vois même pas comment je pourrais faire autrement.