« Et pendant ce temps, vous tenez les cinq billets de mille qu’on vous a donnés à l’aéroport, et vous essayez de payer avec, en vain car ils sont inutilisables en Inde, parce que personne ne peut vous rendre la monnaie, non qu’on veuille vous voler votre argent, mais plutôt que personne n’a autant d’argent en liquide, …
Il y a des feux qui brûlent à même le goudron, des tas de pneus usagés qui servent d’habitation, des bouts de viande sanguinolente, des vaches dans les rues, des moutons égorgés mais toujours attachés par le cou, un ruisseau bordé d’une palissade de 5 m de hauteur avec une corniche rempli de détritus, d’eaux usées, de saloperies (…). Et ainsi de suite, des pneus qui brûlent, des feux de déchets qui couvent, des feux à même le goudron et partout, au milieu, il y a des gens, des femmes en saris bariolés, leurs bicoques sont faites avec des guenilles, des bouts de tôle et des vieux pneus, couvertes de couleurs diverses et passées, et vous qui avez parcouru le monde entier, qui avez vécu 3 ans à Bergen, en Norvège, et 7 ans à Brisbane, dans le Queensland, en Australie, et qui n’avez jamais fait la moindre photo, voilà que votre téléphone en est plein, et, quand vous les prenez en photo, ils vous adressent de larges, de radieux sourires, sont attentifs et se laissent faire pour ensuite vous prendre des mains votre téléphone, tendrement, et vous sourire et disparaître avec et puis vous le ramener, et vous, vous avez peur de le toucher parce que vous avez peur de leur dysenterie, de leur peste, de leur typhus, de leur hépatite et de leur SIDA.