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Citation de Charybde2


En privé, Domingo, à qui parvient immédiatement cette objection, se défendit en disant qu’avant d’adosser la charrette au conduit du haut il avait jeté un coup d’œil aux autres pour déterminer lequel d’entre eux donnait le plus d’eau, de sorte qu’il pouvait bien le jurer sur la tête de toute sa famille, quand il était arrivé pour la première fois sur la place, il n’y avait ni corps ni âme. Cette explication ne satisfit pas non plus pleinement, car un homme connaissant aussi bien le régime de la fontaine que Domingo Cuadrado devait très bien le savoir : quel que soit son comportement fantaisiste, ses quatre conduits donnaient toujours une eau semblable, abondante ou rare, fraiche ou chaude, sereine ou inquiète, silencieuse ou bruissante. Comme il se produit toujours lorsqu’une affaire grave dépend de la vraisemblance d’une autre, futile, très vite le village divisé en deux camps s’empêtra dans une controverse sur la similitude ou la disparité de comportement des quatre conduits : on allait jusqu’à affirmer à la fois qu’ils donnaient toute l’année la même eau, qu’il n’y avait pas deux jours pareils, qu’ils procédaient de quatre sources distinctes, que chacun correspondait à une saison différente, que les uns fournissaient de l’eau pour boire et les autres pour bouillir ; en somme, personne ne connaissait la fontaine dont ils avaient bu l’eau toute leur vie, comme leurs parents et leurs ancêtres. Et lorsque l’énigme du cadavre s’évanouit sans avoir été résolue, longtemps encore traîna le problème de la fontaine, à laquelle beaucoup consacrèrent des heures d’étude, d’analyse et de discussion, comme s’il s’agissait d’un objet tombé du ciel, sans histoire antérieure à ce torride samedi d’un mois de juillet inquiétant et augural.
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