Julien Riposo

Extrait:

Voici notre point de départ : ce qui fait que nous sommes ce que nous sommes. Nous pourrions penser que ce que nous sommes, nous le devenons en fait. Il y a une dimension nécessairement temporelle dans cette vision, car devenir quelqu’un suppose que l’on a été quelqu’un d’autre avant. Le passé constitue une marque d’évolution de nous-même, de notre façon de nous comporter, de réfléchir, ce qui est forcément lié à une modification de nos facultés de perception et d’interprétation. L’ensemble de ces changements est gouverné par nos émotions, nos sentiments, nos désirs. En particulier, nous savons que ces derniers constituent un moteur de l’être. Un désir pourrait être vu comme une force d’attraction vers un objet nécessairement extérieur à mon être. D’abord, il est une force d’attraction vers un objet, mais pourquoi suis-je attiré ? Probablement pour combler ce que je crois être un manque, qui me vide et m’empêche de développer mon être. Il me vide puisque je ne pense qu’à l’objet que je juge source de satisfaire mon manque, alors que je suis bien plus qu’un simple être d’attraction, et il m’empêche de me développer, puisque je n’atteins pas ces possibilités autres que celle d’être attiré par l’objet en question, alors que ces autres possibilités pourraient aboutir à l’atteinte authentique de mon être et de sa compréhension.

Extrait:

Une idée vous passe par la tête. Passe-t-elle nécessairement sous forme de phrase ? Vous est-il déjà arrivé que cette idée soit aussi vague, floue, tellement peu concrète, que le simple fait d’essayer d’y mettre des mots aboutissait à un sentiment de dissatisfaction intellectuelle au point de vous dire que l’idée est mauvaise ? Le langage y est pour quelque chose : dans son stade abstrait, une idée a plusieurs possibilités pour devenir concrète, et c’est ce que j’appellerais l’ensemble des possibles. Cette idée ne regarde que l’être qui la véhicule en lui-même, et pas les autres, parce que cette idée n’est formulée d’aucune manière que ce soit tant qu’une forme de langage n’y sera pas dévouée. Une idée abstraite reste cependant irréalisable, puisqu’un langage indique comment la mettre en pratique – limitant d’ailleurs son champ d’action. Mettre en lumière une idée aux yeux des autres, et peut-être de soi-même, c’est rendre compte, d’une certaine manière, d’une possibilité concrète, mais alors plutôt qu’une autre. Si deux individus bien distincts avaient la même idée, en mettant que cela soit possible, la formulation serait sans doute différente chez l’un comme chez l’autre, illustrant alors l’ensemble des possibles d’une idée.

Extrait:

Dans le monde de l’entreprise, nous travaillons au sein d’une communauté principalement pour apporter un soutien à une équipe, ou encore, plus directement, pour répondre aux besoins (désirs ?) de clients. Dans tous les cas, un travail d’équipe est primordial, notamment parce que la tâche à accomplir n’est jamais vraiment simple. Cette complexité pour parvenir à l’objectif est divisée en plusieurs parties élémentaires, qui doivent être élaborées par des compétences quelques fois bien différentes. Une pièce manquante, et impossible de progresser : le travail et la réussite dépendent de chacune de ces pièces ajustées précisément et d’une certaine manière. Ce genre de situation abonde dans les entreprises : comme nous ne travaillons pas tous au même rythme, certains travaillent plus vite que d’autres, et les choses peuvent alors traîner.

Posons-nous, ne serait-ce qu'une dizaine de secondes. Regardons, écoutons, sentons, et constatons que nous sommes plus que ce que nous pensons être.