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Citation de enkidu_


Dans la femme vraie — typique, absolue — on reconnaissait en effet la présence de quelque chose de spirituellement dangereux, d’une force fascinante, en même temps que dissolvante; ceci explique l’attitude et les préceptes de cette ascèse particulière qui repoussait le sexe et la femme comme pour couper court au danger. L’homme qui n’a choisi ni la voie du renoncement au monde, ni celle d’un détachement impassible dans le monde, peut affronter le danger et, ici encore, extraire du toxique un aliment de vie, s’il use du sexe sans en devenir l’esclave et s’il sait en activer les dimensions profondes élémentaires et en un certain sens trans-biologiques.

Comme nous l’avons dit, ces possibilités sont exceptionnelles dans le monde actuel et ne peuvent se présenter que par suite d’un heureux hasard, en raison de ce quelles présupposent, et en raison aussi des circonstances absolument défavorables résultant de l’« émoussement » qui caractérise souvent la femme telle que l’a façonnée, en général, la civilisation actuelle. Il n’est pas facile, en effet, de s’imaginer une « femme absolue » sous les traits d’une fille « évoluée », plus ou moins américanisée. D’une manière plus générale, il n’est pas très facile non plus d’imaginer la coexistence des qualités requises, chez la femme, telles que nous les avons indiquées plus haut, avec celles qu’exigent des rapports qui, comme nous le disions, devraient aussi être « modernes », c’est-à-dire libres, clairs et indépendants. Il faudrait pour cela une formation toute spéciale de la femme, formation paradoxale, car en un certain sens elle devrait reproduire la structure « duelle » du type masculin différencié : ce qui, malgré certaines apparences, est bien loin de correspondre à l’orientation que prend généralement la vie de la femme moderne.

En réalité, l’entrée de la femme à égalité de droits, dans la vie pratique moderne, sa liberté nouvelle, le fait qu’elle côtoie les hommes dans les rues, dans les bureaux, dans la vie professionnelle, dans les usines, sur les terrains de sport et jusque dans la vie politique et dans l’armée, font partie de ces phénomènes de dissolution de l’époque dont il est difficile, dans la plupart des cas, de voir la contrepartie positive. Essentiellement, ce qui se manifeste dans tout ceci, c’est le renoncement de la femme à son droit d’être femme. La promiscuité des sexes dans la vie moderne ne peut que « décharger », dans une plus ou moins grande mesure, la femme de la force dont elle était porteuse, ne peut que conduire à des rapports, plus libres certes, mais primitifs, entravés par tous les facteurs et les intérêts pratiques qui dominent la vie moderne. Ainsi, les processus en cours dans la société actuelle, avec la nouvelle situation de la femme, s’ils peuvent être favorables à l’une des deux exigences que nous avons relevées — celle qui a trait à des rapports plus clairs, libres et essentiels, au-delà du moralisme comme des déliquescences du sentimentalisme et de l’« idéalisme » bourgeois — ne sauraient qu’être contraires à la seconde exigence, relative à l’activation des forces plus profondes qui définissent la femme absolue. (pp. 252-253)
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