L’art, c’est mordre dans l’éphémère.
Est-ce qu'on sait à quoi elle ressemble, Marguerite Yourcenar ?
Et bien sûr, non, personne. Moi, j'ai ri. Les jumeaux m'ont regardée comme si j'avais tué l'un d'eux. Alors comme on cherchait, il fallait bien qu'on trouve à quoi elle ressemblait, Marguerite Yourcenar. On a cherché des bios, à la bibliothèque nationale, celle en forme de livres ouverts. La BnF, qu'on l'appelle ici. Des photos qu'on cherchait surtout. On en a trouvé une. Elle avait un foulard sur la tête, enfin une écharpe. Qui couvrait la tête et les épaules, qui encadrait son visage, ses yeux fentes, sa bouche, une bouche de baiser, une bouche trop rouge, même en noir et blanc, trop sanguine, trop jeune pour ce visage de vieille femme. Une bouche qui mange toujours, qui embrasse toujours, goulue, qui refuse la mort, et qui veut se faire manger à son tour : lèvres pleines, fermées, demi-sourire, rides aux coins, bagues à un doigt sur chacune de ses mains.(p.31)
Tu te laisses embrasser comme on se laisse écrire. Et ta bouche étonnée qui se meut, qui s'émeut, qui se mue, ta bouche gercée craquelée salée. De la pulpe très sèche et parfumée au gloss. Framboise. Sel.
Et la peau, la peau des lèvres qui s'effrite.
Qui s'arrache.
L'imparfait de l'indicatif est le temps le plus douloureux.
Le parfum de son homme, elle l’avait fabriqué elle-même. Pour qu’elles sachent, les autres, qu’il lui appartenait.