Laurent Queyssi

Le carburant avait encore augmenté. Pas au point de déclencher la révolution qui ne saurait venir avant l’Apocalypse, mais presque. Bientôt, les habitants de la région n’en pourraient plus, mais ils n’iraient pas rouler avec leurs grosses bagnoles sur les trottinettes des citadins barbus. Ils ne prendraient pas non plus d’assaut les cours de Pilates et les restaurants de sushis, pas plus qu’ils ne démonteraient les bureaux de coworking ou feraient avaler à des graphistes trop payés leurs MacBook Pro fabriqués par des enfants morts d’épuisement avant quatorze ans. Non, ils laisseraient la nature se charger d’expliquer à tous ceux qui méprisaient leur mode d’existence tout en rêvant d’une résidence secondaire « à la campagne » que la terre est basse, la douleur constante et la vie une chienne.
En refermant mon réservoir, j’ai constaté avec effarement qu’il restait encore en moi une part d’enragé qui ne comprenait pas les uns, mais pas non plus totalement les autres.