Léa Silhol

Il décacheta l'enveloppe d'où s'exhalait cette odeur de miel et d'amande qu'il reconnut immédiatement, et en tira une carte de visite aux armes de la comtesse : "de sable à l'aiguière d'or". Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'il lut :
"Cher Monsieur Afadet
Tenez votre promesse et venez me rendre visite... Rien ne me ferait plus plaisir que de vous avoir à dîner samedi soir, à neuf heures. Cela vous convient-il ? Et pour vous inciter à ne pas me priver de votre présence, je vous avoue être fort intéressée par l'existence de ce si précieux élixir dont je crois savoir que vous détenez la formule... Je puis vous assurer que ce sujet ne sera abordé que de la manière la plus confidentielle qui soit.
Allons, je vous attends..."
Stupéfait, Jacques relut le message en un dérisoire réflexe d'incrédulité. Comment diable cette femme était-elle au courant pour son élixir ? Personne, vraiment personne - pas même son épouse et sa mère avant elle - n'avait partagé le secret que seuls les Jacques Afadet se confiaient, l'heure venue, en jurant de se taire. Lui-même n'en avait pas encore parlé à son fils. C'était par trop incroyable qu'une étrangère eût connaissance de la grande affaire familiale !
(Un si précieux élixir)